CLAUDEL (Paul)


CLAUDEL (Paul) 1868-1955

Claudel.jpg

 

Biographie

Paul Claudel, frère cadet de la sculptrice Camille Claudel, est né à Villeneuve-sur-Fère, en 1868. En 1882, il arrive, avec sa mère et sa sœur, à Paris, où ils habitent au 31 boulevard de Port-Royal, jusqu’en 1892.
Paul Claudel, selon ses dires, baignait, comme tous les jeunes gens de son âge, dans « le bagne matérialiste du scientisme de l’époque ». Il se convertit au catholicisme en assistant en curieux aux vêpres à Notre-Dame de Paris le 25 décembre 1886, jour de Noël. « J’étais debout, près du deuxième pilier, à droite, du côté de la sacristie. Les enfants de la Maîtrise étaient en train de chanter ce que je sus plus tard être le Magnificat. En un instant mon cœur fut touché et je crus. »
Au même moment, Paul Claudel découvre les « Illuminations », un recueil de poèmes d’Arthur Rimbaud dont la lecture sera pour lui déterminante. L’influence de celui qu’il appelait le « mystique à l’état sauvage » est manifeste, par exemple, dans « Tête d’or », une de ses premières pièces de théâtre.
Diplomate en 1893 , il est consul de France à Prague, Francfort, Hambourg, en Chine à Shanghai, Fou-Tcheou (Fuzhou) et Tsien-Tsin (Tianjin), ministre plénipotentiaire à Rio de Janeiro, à Copenhague, ambassadeur de France à Tokyo de 1921 à 1927, à Washington, puis à Bruxelles, où se termine sa carrière diplomatique en 1936.
Lorsqu’il s’installe définitivement dans sa propriété de Brangues, le travail littéraire, mené jusqu’alors parallèlement à sa carrière diplomatique, occupe la plus grande part de son existence.
En 1938, Claudel entre au conseil d’administration de la Société des Moteurs Gnome et Rhône, grâce à la bienveillance de son directeur, Paul-Louis Weiller, mécène et protecteur de nombreux artistes (Jean Cocteau, Paul Valéry, André Malraux). Ce poste, richement doté, lui vaudra de nombreuses critiques : à la fois par le statut social et le montant des émoluments qu’il en retire mais aussi par le fait qu’au cours de la Seconde Guerre mondiale, cette entreprise de mécanique participera à l’effort de guerre allemand pendant l’Occupation. Aussi, à partir de 1940, Paul-Louis Weiller, juif, sera écarté de la direction.
Attristé par les débuts de la guerre, et notamment l’invasion de la Pologne, au cours d’un mois de septembre 1939 qu’il juge par ailleurs « merveilleux », Claudel est initialement peu convaincu par le danger que représente l’Allemagne nazie. Il s’inquiète davantage de la puissante Russie qui représente selon lui une « infâme canaille communiste ».
En 1940, il voit d’abord une délivrance dans les pleins pouvoirs conférés par les députés à Pétain. Il note dans son Journal (« Vue de la France » au 6 juillet 1940) : « La France est délivrée après soixante ans de joug du parti radical et anticatholique (professeurs, avocats, juifs, francs-maçons). Le nouveau gouvernement invoque Dieu et rend la Grande-Chartreuse aux religieux. Espérance d’être délivré du suffrage universel et du parlementarisme. »
Toutefois, le spectacle de la collaboration avec l’Allemagne l’écœure bientôt. En novembre 1940, il note dans le même Journal : « Article monstrueux du cardinal Baudrillart dans La Croix nous invitant à collaborer « avec la grande et puissante Allemagne » et faisant miroiter à nos yeux les profits économiques que nous sommes appelés à en retirer ! (...) Fernand Laurent dans Le Jour déclare que le devoir des catholiques est de se serrer autour de Laval et de Hitler. – Les catholiques de l’espèce « bien-pensante » sont décidément écœurants de bêtise et de lâcheté. »
Dans le Figaro du 10 mai 1941, il publie encore des « Paroles au Maréchal » (désignées couramment comme l’Ode à Pétain) qui lui sont souvent reprochées. La péroraison en est : « France, écoute ce vieil homme sur toi qui se penche et qui te parle comme un père./ Fille de saint Louis, écoute-le ! et dis, en as-tu assez maintenant de la politique ?/ Écoute cette voix raisonnable sur toi qui propose et qui explique. » Henri Guillemin (critique catholique et grand admirateur de Claudel, mais non suspect de sympathie pour les pétainistes) a raconté que, dans un entretien de 1942, Claudel lui expliqua ses flatteries à Pétain par l’approbation d’une partie de sa politique (lutte contre l’alcoolisme, appui aux écoles libres), la naïveté envers des assurances que Pétain lui aurait données de balayer Laval et enfin l’espoir d’obtenir une protection en faveur de son ami Paul-Louis Weiller et des subventions aux représentations de l’Annonce faite à Marie. À partir d’août 1941, le Journal ne parle plus de Pétain qu’avec mépris.
Paul Claudel a mené une constante méditation sur la parole, qui commence avec son théâtre et se poursuit dans une prose poétique très personnelle, s’épanouit au terme de sa vie dans une exégèse biblique originale. Cette exégèse s’inspire fortement de l’œuvre de l’Abbé Tardif de Moidrey (dont il a réédité le commentaire du Livre de Ruth), mais aussi d’Ernest Hello. Claudel s’inscrit ainsi dans la tradition patristique du commentaire scripturaire, qui s’était peu à peu perdue avec la scolastique, et qui a été reprise au 19e siècle par ces deux auteurs, avant de revenir sur le devant de la scène théologique avec le cardinal Jean Daniélou et Henri de Lubac. Sa foi catholique est essentielle dans son œuvre qui chantera la création : « De même que Dieu a dit des choses qu’elles soient, le poète redit qu’elles sont. » Cette communion de Claudel avec Dieu a donné ainsi naissance à près de quatre mille pages de textes. Il y professe un véritable partenariat entre Dieu et ses créatures, dans son mystère et dans sa dramaturgie, comme par exemple dans « Le Soulier de satin » et « L’Annonce faite à Marie ».
Avec Maurice Garçon, Charles de Chambrun, Marcel Pagnol, Jules Romains et Henri Mondor, il est une des six personnes élues le 4 avril 1946 à l’Académie française lors de la deuxième élection groupée de cette année visant à combler les très nombreuses places vacantes laissées par la période de l’Occupation. Il est reçu le 13 mars 1947 par François Mauriac au fauteuil de Louis Gillet.

Oeuvres

Théâtre