La Foire de Guibray (Alain-René LESAGE)
Prologue en un acte.
Représenté pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre de la Foire Saint-Laurent, en juillet 1714.
Personnages
LE JUGE DE GUIBRAY
PIERROT, son secrétaire
ARLEQUIN, faux acteur arabe
SCARAMOUCHE, faux acteur arabe
UN COMÉDIEN ITALIEN
DEUX ACTRICES de la troupe d’Arlequin
UN MUSICIEN
TROUPE DE SYMPHONISTES
La scène est à la foire de Guibray.
Le théâtre représente les faubourgs de Falaise. On voit dans l’enfoncement des tentes, des hommes, des chevaux, des bœufs, et tous les préparatifs de la foire de Guibray.
Scène première
ARLEQUIN, SCARAMOUCHE
SCARAMOUCHE.
Air n° 12, ou Réveillez-vous, belle endormie.
Enfin nous voici dans Falaise ;
Nous travaillerons dès demain.
ARLEQUIN.
Ma foi, l’ami, j’en suis bien aise,
Car j’aime fort les tours de main.
SCARAMOUCHE.
Air n° 42, ou Jupiter, prête-moi ta foudre.
La foire de Guibray s’apprête ;
Je vois les marchands s’assembler.
Allons voler... mais...
ARLEQUIN.
Qui t’arrête ?
SCARAMOUCHE.
Le magistrat me fait trembler.
Air n° 3, ou Je t’ai planté, je l’ai vu naître.
Quoique Normand, il est sévère,
Ennemi juré des fripons.
ARLEQUIN.
Sur ce pied-là, mon cher confrère,
Plions, bagage, décampons.
SCARAMOUCHE.
Air n° 48, ou Tout est charmant chez Aspasie.
Non. Pour dérober à la foire
Employons d’innocents moyens.
Arlequin, si tu m’en veux croire,
Nous nous ferons comédiens.
Air n° 7, ou Tu croyais, en aimant Colette.
N’approuves-tu pas mon idée ?
Passons pour des acteurs françois :
Jouons le Cid, ou bien Pompée.
ARLEQUIN.
Fi ! nous ne jouerions pas deux fois.
Air n° 15, ou Monsieur le prévôt des marchands.
Ami, soyons comédiens,
Non français, mais italiens :
Nous aurons bien de ta pratique.
SCARAMOUCHE.
Oui ; mais il en vient d’arriver.
Si nous vendons même comique,
Nous aurons peine à nous sauver.
ARLEQUIN.
Refrain de l’air n° 49, ou Vivons pour ces fillettes vivons ; ou As-tu vu la lune, mon gars ?
Hé bien ! soyons Arabes,
Soyons,
Soyons acteurs arabes.
SCARAMOUGHE, riant.
Air n° 24, ou Tu Broyais, en aimant Colette.
Une troupe arabe à Falaise !
Le plaisant projet que voilà !
Ami, j’en veux rire à mon aise.
ARLEQUIN, se mettant le doigt sur le front.
Mon enfant, ce trait part de là.
SCARAMOUCHE.
Air n° 50, ou Lampons, lampons.
Allons, Arlequin, joignons (bis.)
Au plus tôt nos compagnons ; (bis.)
Et concertons sans remise
Cette grotesque entreprise.
Lampons, lampons,
Camarade, lampons.
ARLEQUIN et SCARAMOUCHE, en s’en allant et en dansant.
Ami, soyons Arabes,
Soyons,
Soyons acteurs arabes.
Scène II
LE JUGE, PIERROT
LE JUGE.
Air n° 16, ou Je reviendrai demain au soir.
Ah ! que de tentes dans les champs !
Voilà bien des marchands ! (bis.)
PIERROT.
Je vois aussi bien des chevaux.
Morbleu ! que d’animaux ! (bis.)
LE JUGE, d’un air vain.
Air n° 41, ou Sous un ciel pur et sans nuage. (de Ninon chez madame de Sévigné.)
Ce peuple, toute cette foule
Reçoit mes ordres souverains.
PIERROT, souriant.
Pierrot, à l’appui de la boule,
Sait faire travailler ses mains.
LE JUGE le regardant de travers.
Air n° 36, ou De tous les capucins du monde.
Ah ! craignez que je ne punisse
Sévèrement votre avarice !
Faites les choses noblement.
Je hais un esprit mercenaire.
Songez que vous êtes Normand,
Et, qui plus est, mon secrétaire.
PIERROT, sur le ton du dernier vers.
Allez, monsieur, laissez-moi faire.
LE JUGE.
Air n° 33, ou Ma mère, mariez-moi.
Contente-toi donc, mon fils,
Des légitimes profits.
Chez moi ton poste est fort beau ;
Car on vient souvent graisser le marteau.
PIERROT.
Oui ; mais de chaque gâteau
Votre femme a son chanteau.
LE JUGE.
Paix.
Air n° 19, ou Je suis encor dans mon printemps.
Cette foire il arrivera,
S’il plaît à Dieu, de la bagarre ;
J’espère que cela rendra.
PIERROT.
Oui monsieur ; c’est de l’or en barre ;
Il ne se donne point de coups
Qu’ils ne soient de l’argent pour vous.
LE JUGE.
Air n° 51, ou Il n’est qu’un pas du mal au bien.
Un juge de Normandie
Doit avoir de l’entendement.
PIERROT.
Un franc Picard, assurément,
N’y pourrait pas gagner sa vie.
LE JUGE.
Un juge de Normandie
Doit avoir de l’entendement.
Scène III
LE JUGE, PIERROT, UN MUSICIEN
LE MUSICIEN.
Air n° 52, ou Robin, turelure lure.
Du magistrat de Guibray
Vous avez toute l’allure.
LE JUGE.
Aussi le suis-je.
LE MUSICIEN.
Est-il vrai ?
Turelure.
La respectable figure !
Robin, turelure lure.
Air n° 23, ou Laire la, laire lon laire.
Je viens avec soumission
Vous demander permission
De pratiquer mon savoir-faire.
PIERROT.
Laire-la, laire lan-laire,
Laire-la,
Laire lan-la.
LE JUGE.
Même air.
Auparavant apprenez-moi,
S’il vous plaît, quel est votre emploi.
PIERROT, à part.
Il a l’air d’un visionnaire.
Laire-la, etc.
LE MUSICIEN.
Air n° 51, ou Il n’est qu’un pas du mal au bien.
Je suis un nouvel Orphée ;
Tout cède à mes accords touchants...
Des Amphions de notre temps
Voyez en moi le coryphée.
Je suis un nouvel Orphée,
Tout cède à mes accords touchants.
PIERROT, à part.
Je l’ai bien dit.
LE MUSICIEN, gravement.
Air n° 55, ou Au son de ma lyre admirable.
Au son de ma lyre admirable
Tout rocher est inébranlable ;
Les arbres semblent m’écouter :
Et lorsqu’assis sur la rive,
Ma voix commence d’éclater,
Je vois l’onde fugitive
Couler toujours sans s’arrêter.
PIERROT, sur le ton du dernier vers.
Diable ! le grand sorcier !
LE MUSICIEN.
Air n° 17, ou Des trembleurs.
Je sais faire des sonates ;
J’ai composé des cantates.
LE JUGE, bas.
Et bien d’autres pièces plates.
LE MUSICIEN.
Lulli rampe devant moi.
Mes rondeaux font les délices...
PIERROT, l’interrompant.
Des marchands de pain d’épices.
LE MUSICIEN.
Surtout j’ai de beaux caprices.
LE JUGE.
Pour celui-là, je le crois.
LE MUSICIEN.
Air n° 42, ou Jupiter, prête-moi ta foudre.
J’ai fait autrefois pour la Foire
Des cotillons[1] qu’on admira,
Et qu’aujourd’hui même on fait gloire
De copier à l’Opéra.
LE JUGE.
Air n° 2, ou En vain la fortune ennemie.
Vous faites un bel étalage
Des talents que vous possédez ;
Sans doute ici vous prétendez
En faire quelque usage ?
LE MUSICIEN.
Air n° 32, ou Chantez, dansez, amusez-vous. (De la Rosière.)
Je viens m’établir à Guibray
Pendant le cours de cette foire ;
Et tous les jours je donnerai
Des concerts charmants.
LE JUGE, riant.
Je veux croire
Que vous êtes un Apollon.
LE MUSICIEN.
Jugez-en par l’échantillon.
Air n° 48, ou Tout est charmant chez Aspasie.
Commençons par une cantate ;
C’est un morceau des plus charmants.
À ses symphonistes.
Ensuite, par une sonate,
Faites ronfler vos instruments.
Le musicien chante la cantate suivante.
Air n° 54, ou Le chasseur Actéon au bain surprit un jour.
Le chasseur Actéon au bain surprit un jour
Diane avec toute sa cour.
Il voit la déesse et sa suite ;
Il est charmé de tant d’appas.
Au lieu de s’éloigner par une prompte fuite,
Le plaisir arrête ses pas.
Mais dans le même instant la déesse en colère
Punit avec rigueur ce mortel téméraire.
Craignons le plaisir,
Ayons des alarmes,
Lorsqu’il vient s’offrir
Avec tous ses charmes.
Pour lui résister,
Songeons à la peine
Qu’il peut nous coûter
Quand il nous entraine.
Actéon (quel triste destin !)
D’un cerf bientôt prit la figure,
Il servit même à ses chiens de pâture,
Et telle fut sa déplorable fin.
Ah ! si la sévère immortelle
Au bain toute seule eût été,
Elle ne l’aurait pas traité
D’une manière.si cruelle.
Prenez, amants,
Bien voire temps
Auprès des belles.
Dans certains moments,
N’attendez d’elles
Que de vrais tourments ;
Dans d’autres instants,
Les plus cruelles
Vous rendront contents.
Prenez, amants,
Bien votre temps
Auprès des belles.
Le musicien, après avoir chanté, fait signe aux symphonistes de jouer la sonate. Il en bat la mesure comiquement. Après quoi le juge lui dit :
LE JUGE.
Air n° 5, ou Je l’ai planté, je l’ai vu naître.
J’aime fort votre symphonie.
LE MUSICIEN.
Trouvez-vous les accords...
LE JUGE, l’interrompant.
Très beaux.
Vous pourrez par cette harmonie
Charmer nos marchands de chevaux.
Le musicien sort, et il entre un comédien italien, qui a un plumet sur son chapeau. Il fait vingt révérences au juge.
Scène IV
LE JUGE, PIERROT, UN COMÉDIEN ITALIEN
LE JUGE, fatigué de tant de révérences, dit.
Air n° 55, ou Va-t’en voir s’ils viennent, Jean.
Parlez-moi sans compliment,
Monsieur, je vous prie.
Vous venez apparemment
Demander mon agrément.
Parlez-moi sans compliment,
Monsieur, je vous prie.
LE COMÉDIEN ITALIEN.
Air n° 12, ou Réveillez-vous, belle endormie.
C’est pour une troupe comique
Qui vient d’arriver en ces lieux.
LE JUGE.
Allez ailleurs lever boutique,
Vous ferez, je crois, beaucoup mieux.
LE COMÉDIEN ITALIEN.
Pourquoi donc ?
LE JUGE.
Air n° 19, ou Je suis encor dans mon printemps. (d’Une Folie.)
Ici, l’an passé, des acteurs,
Malgré des pièces admirables,
N’eurent pas quatre spectateurs.
Pour renvoyer les pauvres diables,
Je fis quêter chez les bourgeois.
LE COMÉDIEN ITALIEN.
C’était donc des acteurs françois ?
PIERROT.
Eh ! vraiment oui.
LE COMÉDIEN ITALIEN.
Air n° 11, ou Le fameux Diogène.
Oh ! c’est une autre affaire !
Moi, je pourrai bien plaire,
Je suis Italien.
Ma troupe polissonne
Dans le goût forain donne.
LE JUGE.
Je ne vous dis plus rien.
Air n° 56, ou Londeriri.
À Falaise comme à Paris
La bagatelle est d’un grand prix,
Landerirette.
Vous ferez quel que chose ici.
PIERROT.
Landeriri.
LE JUGE.
Air n° 47, ou Lon lan la, derirette.
Vos acteurs sont-ils excellents ?
LE COMÉDIEN ITALIEN.
Ils ont de merveilleux talents,
Lon lan la, derirette ;
Il faut les voir faire un lazzi,
Lon lan la, deriri.
LE JUGE.
Air n° 22, ou La faridondaine.
Vous êtes sans doute munis
De mainte drôlerie ;
Vous devez en être fournis.
LE COMÉDIEN ITALIEN.
Nous jouons de génie ;
Il nous suffit qu’un plan soit bon,
La faridondaine,
La faridondon,
Chaque acteur l’a bientôt rempli.
PIERROT.
Biribi,
À la façon de Barbari,
Mon ami.
LE JUGE.
Même air.
Votre Arlequin est-il plaisant ?
LE COMÉDIEN ITALIEN.
Il fait crever de rire.
LE JUGE.
Le Pantalon ?...
LE COMÉDIEN ITALIEN.
Est amusant.
LE JUGE.
Le docteur ?...
LE COMÉDIEN ITALIEN.
On l’admire.
LE JUGE, riant.
N’avez-vous pas quelque tendron,
La faridondaine
La faridondon !
LE COMÉDIEN ITALIEN.
Chez nous tout le sexe est joli.
PIERROT, riant.
Biribi,
À la façon de Barbari
Mon ami.
LE JUGE.
Air n° 2 4, ou Tu croyais, en aimant Colette ; ou Réveillez-vous, belle endormie.
D’une gracieuse fillette
J’aime mieux voir les traits vainqueurs
Que la pièce la plus parfaite.
LE COMÉDIEN ITALIEN.
Vous avez le goût des seigneurs.
On entend en cet endroit un bruit de timbales et de trompettes, et Arlequin s’avance en dansant. Il a un casque et un tonnelet garni de plumes. Il est suivi de deux actrices habillées dans le même goût, qui demeurent dans le fond du théâtre. Pierrot s’en va.
Scène V
LE JUGE, LE COMÉDIEN ITALIEN, ARLEQUIN, LES DEUX ACTRICES
ARLEQUIN.
Air n° 57. Air chinois.
Holà, hé, } (bis.)
Holà, cha. }
La milaloya. (bis.)
En chantant ainsi, il danse, et à la fin de la chanson il fait une cabriole et donne des coups de poing au juge et au comédien italien ; ce qui arrive toutes les fois qu’il reprend l’air chinois.
Air n° 58, ou Laire la, laire lantaire.
Vous ne savez pas qui je suis.
Il interrompt l’air pour reprendre le premier.
Holà, hé, etc.
Je suis comédien arabe.
Il reprend encore l’air chinois.
Holà, hé, etc.
Air n° 13, ou Monsieur le prévôt des marchands.
On dit que des comédiens,
Certains farceurs italiens,
Viennent d’arriver à la foire ;
Et qu’à Guibray ces compagnon,
Prétendent me ravir la gloire
De divertir les maquignons.
LE JUGE, à Arlequin.
Air n° 59, ou Y avance, y avance.
Que venez-vous me demander ?
ARLEQUIN.
Ce que vous devez m’accorder.
Je veux sur eux la préférence.
LE COMÉDIEN ITALIEN, d’un air dédaigneux.
Y avance, y avance, y avance,
Beau teint de jambon de Mayence.
Même air.
Voyez-vous ce plaisant acteur
Qui vient faire ici le docteur,
Et veut nous imposer silence.
ARLEQUIN.
Y avance, y avance, y avance,
Avec ton air de suffisance.
Les deux actrices qui sont demeurées au fond du théâtre s’avancent, et Arlequin les présente au juge, en lui disant :
Air n° 41, ou Sous un ciel pur et sans nuage. (Ninon chez madame de Sévigné.)
Vous voyez deux de mes actrices,
Daignez recevoir leurs respects.
LE JUGE, à part.
Voilà des beautés de coulisses
Dont les appas sont un peu secs.
Les actrices s’approchent du juge, et l’agacent, ce qui lui fait dire :
Air n° 42, ou Jupiter, prête-moi ta foudre.
Mais les actrices d’Arabie
Ont bien de la vivacité !
PREMIÈRE ACTRICE.
Faut-il un air de modestie ?
Nous l’aurons bientôt emprunté.
Air n° 12, ou Réveillez-vous, telle endormie.
Par une allure de vestale
Ne vous laissez point imposer :
Toute héroïne théâtrale
Sans peine sait se composer.
ARLEQUIN, montrant au juge la seconde actrice.
Air n° 24, ou Tu croyais, en aimant Colette.
Regardez cette autre commère.
Pour la danse elle a du talent.
LE JUGE.
Voyons donc ce qu’elle sait faire ;
Tudieu ! qu’elle a l’air sémillant !
Arlequin danse avec la seconde actrice : le juge en paraît content.
ARLEQUIN.
Air n° 46, ou de Joconde.
Il faut à présent faire voir
Si mes pièces sont belles.
Vous allez bientôt le savoir.
Elles sont fort nouvelles.
L’espèce en est, assurément ?
Assez particulière ;
Je vais jouer dans un moment
Toute une pièce entière.
En voici le sujet.
Air n° 25, ou Si vous sentez dans vos âmes.
D’une charmante princesse
Un prince aime les appas ;
Ce n’est point une tigresse ;
Nos dames ne le sont pas.
Arlequin fait faire la princesse à la première actrice. Il l’aborde en faisant des entrechats, et lui exprime par ses gestes le plaisir qu’il prend à la voir. Puis il dit.
Acte premier.
Le juge et le comédien italien se mettent à rire. Arlequin et l’actrice continuent leur scène muette : le prince tombe dans une profonde rêverie ; ensuite il regarde d’un air languissant sa princesse, qui dit, après l’avoir agacé.
Acte second.
Le comédien et le juge redoublent leurs ris. Enfin le lazzi s’achève. Arlequin, transporté d’amour, tombe aux genoux de sa princesse, et dit en se relevant.
Acte troisième.
ARLEQUIN, au juge.
Air n° 56, ou De tous tes capucins du monde.
Trouvez-vous la pièce comique ?
LE JUGE.
Je la trouve très laconique.
LE COMÉDIEN ITALIEN.
C’est tout ce qu’elle a de meilleur.
ARLEQUIN, au comédien italien.
Convenez que dans cet ouvrage
Il n’est point, monsieur le railleur,
Comme chez vous de verbiage.
LE JUGE.
Air n° 60, ou Philis plus avare que tendre.
Ces pièces sont divertissantes ;
Mais vous ne sauriez plaire ici,
Si vous n’en avez de parlantes.
ARLEQUIN.
Oh ! nous savons parler aussi.
LE JUGE.
Air n° 19, ou Je suis encor dans mon printemps. (d’Une Folie.)
Hé bien ! jouez donc tous les deux
L’un après l’autre en ma présence.
Que chacun de vous par ses jeux
Tâche d’avoir la préférence.
Celui qui le plus me plaira,
Dans cette ville restera.
ARLEQUIN.
Je vais jouer Arlequin Mahomet.
LE COMÉDIEN ITALIEN.
Et moi le Tombeau de Nostradamus.
ARLEQUIN, riant.
Air n° 16, ou Je reviendrai demain au soir.
Le tombeau de Nostradamus !
Il a l’esprit perclus. (bis.)
LE COMÉDIEN ITALIEN, se moquant.
Oh diable ! Arlequin Mahomet !
Que ce titre promet ! (bis.)
ARLEQUIN et LE COMÉDIEN ITALIEN, se moquant l’un de l’autre, à l’imitation du musicien et du maître à danser de l’opéra des Fêtes vénitiennes[2].
Ensemble.
Air n° 61, ou air des Fêtes vénitiennes.
Ah ! c’est vous qui l’emportez sur moi.
Ils répètent plusieurs fois ce vers, et s’en vont chacun de son côté, en le chantant d’une manière ironique.
[1] C’est à la Foire qu’on a vu pour la première fois des Cotillons.
Cotillon est le nom d’une sorte de danse : Caprice est celui de certaines pièces de musique ou de poésie.
[2] Les Fêtes vénitiennes sont se Danchet.