Le Soupé mal-apprêté (HAUTEROCHE)

Comédie en un acte.

Représentée pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre de la rue des Fossés Saint-Germain, le 12 juillet 1669.

 

Personnages

 

VALÈRE, amant de Célide

LISIMON, ami de Valère

CÉLIDE

CIDALISE

LE FRÈRE de Célide, ami de Valère

DORISE, suivante de Célide

LISETTE, suivante de Cidalise

PHILIPIN, valet de Valère

UN SERGENT

LE TRAITEUR

 

La scène est à Paris.

 

 

AU LECTEUR

 

Quoique cette petite pièce ait été représentée dans un temps peu favorable  pour la comédie, elle n’a pas laissé d’avoir un peu de réussite, et d’être applaudie de la plus grande partie de ceux qui l’ont vue sur le Théâtre de l’Hôtel de Bourgogne. Quantité de gens, qui sans doute ont été trop favorablement prévenus pour elle, en ont trouvé l’invention particulière, la conduite assez raisonnable, la versification naturelle, et, surtout, purgée de ces basses expressions qui y d’ordinaire, font remplies de quolibets, ou de ces sales équivoques, capables de donner du dégoût à l’honnête homme, et de causer de l’indignation au beau Sexe. Après un jugement si avantageux, j’ai cru que je pouvais bazarder sur le papier ce qui n’avait pas déplu à la représentation. S’il arrive que quelque lecteur se chagrine de n’y point rencontrer de ces grands vers forts et pompeux, je le prie, avant que de me condamner, de considérer que la matière ne le demande pas ; que c’est une pièce d’un acte, où l’on n’a pas la liberté de s’étendre ; et que les vers qui content naturellement un sujet, ne coûtent pas moins à l’imagination que ceux qui font remplis de grands mots, et qui souvent, avec toute leur pompe, ne signifient que très peu de chose. La raison qui fait que ces fortes de vers ne donnent pas moins de peine à tourner que les autres, est que l’imagination, étant seulement attachée à rendre compte des choses arrivées hors de la vue des spectateurs, ou à faire naître, ou à débrouiller quelques incidents, ou bien à faire venir quelque acteur sur la scène, n’a pas la même chaleur que quand elle est échauffée par le mouvement de quelque passion : en cet état, elle est lente dans ses productions ; elle n’est point excitée par les grands sentiments ; les idées qui l’occupent ne lui présentent rien d’élevé ; au contraire, elles font toutes simples, et ne demandant que très peu de discours, et beaucoup de naïveté. J’ose bien dire que, dans l’Amant qui ne flatte point, il y a d’assez beaux vers ; mais, comme c’est une comédie de cinq actes, il ne m’a pas été difficile d’y trouver leur place.

 

 

Scène première

 

VALÈRE, PHILIPIN

 

VALÈRE.

Reposons-nous un peu : ma foi, je fuis bien las ;

Et, pour me rendre ici, j’à bien perdu des pas.

PHILIPIN.

Parbleu ! vous m’avez bien taillé de la besogne,

Pour venir au quartier de l’Hôtel de Bourgogne !

Hé ! pourquoi jusqu’ici, du faubourg Saint Germain,

Avoir fait tant de tours et de retours en vain ?

Ma foi, tous ces détours me mettent hors de gamme.

Passer sur le Pont-Neuf, puis au pont Notre-Dame ;

Se rendre au Châtelet, puis rebrousser chemin ;

Gagner, par divers lieux, la rue Saint Martin ;

Entrer dans une porte, en sortir tout à l’heure ;

Plus bas d’un étranger demander la demeure,

Puis passer brusquement au travers d’un tripot ;

Et tout cela, Monsieur, sans me dire un seul mot !

Ce qui m’a fait encore avaler des couleuvres,

Est ce long entretien avec tous ces Manœuvres,

Dans ce grand bâtiment où vous êtes entré :

Tout ce qu’ils vous disaient était à votre gré ;

Car vous y répondiez d’un ton fort amiable.

Quant à moi, cependant. Je pestais comme un diable,

De vous voir hautement louer ce grand logis,

Et dire que le Maître était de vos amis ;

Puis, de ce bâtiment admirant la structure,

Applaudir le Maçon, vanter l’architecture,

Et sortir par derrière, après cet entretien :

Qui diable, à tout cela, pourrait comprendre rien ?

VALÈRE.

Le chemin que j’ai fait est plaisant et bizarre.

PHILIPIN.

Des pas de Philipin vous n’êtes point avare.

Mais ne saurai-je point pourquoi tout ce tracas ?

Pourquoi tant de détours ?

VALÈRE.

Quoi ! tu ne le fais pas ?

PHILIPIN.

Non ; je fais seulement que, comme un vrai fantasque ;

En de certains moments, vous couriez comme un Basque ;

Pour deviner le reste, il faut être sorcier.

VALÈRE.

Chaque détour était pour fuir un créancier :

Ne les as-tu point vus ?

PHILIPIN.

Ah ! non, je vous proteste ;

J’étais, dans ce tracas, embarrassé de reste ;

Je craignais tellement de vous perdre à tous coups,

Que je n’ai pas levé les yeux de dessus vous.

VALÈRE.

Jamais, pour un seul jour, je n’en vis tant paraitre.

PHILIPIN.

La tricherie, enfin, va toujours à son maître :

Après les avoir fait courir de jour en jour,

Ils vous ont fait aussi courir à votre tour.

En avez-vous tant vu ?

VALÈRE.

J’en ai vu plus de trente.

PHILIPIN.

La face de ces gens est toujours chagrinante.

VALÈRE.

L’aspect des créanciers est une vision

Qui nous cause toujours un peu d’émotion :

Il faut, à leur abord, trouver quelque défaite :

J’aime mieux, devant eux faire au plutôt retraite,

Que de me voir contraint à dire : « Excusez-moi,

« Je vous contenterai, lorsque j’aurai de quoi ;

« Je suis au désespoir de ne le pouvoir faire.

« Dans quelque temps d’ici, je conclus une affaire

« Qui doit me rapporter de quoi vous bien payer ;

« J’aurai soin, aussitôt de vous en envoyer ;

« Ensuite nous ferons quelque nouveau commerce ».

À peu près, de ces mots, c’est ainsi qu’on les berce :

Et s’ils n’écoutent point ces promesses en l’air,

Alors il faut se taire, et les laisser parler,

Souffrir de telles gens le murmure et les plaintes,

D’un reproche incommode essuyer les atteintes,

Se faire, à les entendre, un violent effort,

Et se dire, après tout : « Qui doit, a toujours tort ».

Ainsi, pour éviter leur plainte et leur murmure,

Ou n’être pas réduit à faire une imposture,

J’aime bien mieux les fuir par cent et cent détours,

Que fourber, ou souffrir leurs chagrinants discours.

PHILIPIN.

Puisque vous craignez tant leurs fâcheuses paroles,

Pourquoi perdre à trois dés, l’autre jour, cent pistoles ?

Il fallait leur donner, et non pas les jouer.

VALÈRE.

J’aurais mieux fait, sans doute y il le faut avouer ;

Mais c’en est fait.

PHILIPIN.

Dans peu, je vous tiens hors d’affaire,

Par l’argent que vous doit apporter votre père :

Le bonhomme à propos vient à notre secours.

VALÈRE.

Il doit, tout au plus tard, arriver dans dix jours.

PHILIPIN.

Que faire, cependant ? Nous n’avons pas le double.

VALÈRE.

Plus j’y pense, morbleu ! plus mon chagrin redouble ;

Car j’ai promis, ce soir, de donner à souper.

PHILIPIN.

Où ?

VALÈRE.

Chez moi.

PHILIPIN.

Là-dessus, vous pourrez vous tromper ;

Les gens qui sont priés, pourront mâcher à vide.

Mais à qui ce soupé, s’il vous plaît ?

VALÈRE.

À Célide.

PHILIPIN.

Non ! vous vous moquez.

VALÈRE.

Point ; je te dis vrai.

PHILIPIN.

Bon ! bon !

VALÈRE.

Quoi ! tu m’en blâmes ?

PHILIPIN.

Point. Oh ! vous avez raison.

Que lui donnerez-vous ? vous lui ferez grand’chère ?

VALÈRE.

Oui.

PHILIPIN.

Vous deviez aussi prier Monsieur son frère.

VALÈRE.

Il venait de sortir.

PHILIPIN.

Ma foi, tant mieux, pour lui ;

Peut-être il pourrait bien ne souper d’aujourd’hui.

VALÈRE.

Pourquoi ?

PHILIPIN.

Pourquoi ? Morbleu ! nous n’avons pas la maille,

Ni plus de crédit.

VALÈRE, riant.

Bon !

PHILIPIN.

Vous croyez que je raille ?

Traiteur, Confiturier, Rôtisseur, Pâtissier,

Fruitier, Limonadier, Boulanger, Épicier,

Pour nous, chez ces gens-là, le crédit est au diable,

Et mon aspect pour eux est un monstre effroyable.

Bien loin de perdre au jeu, vous deviez les payer :

Cent affronts tous les jours il me faut essuyer :

Mais je ferais comme eux, si j’étais en leur place.

Je les verrai dans peu me sauter à la face ;

Car ils prônent toujours que c’est un mes beaux mots

Qu’ils ont donné leur bien, et qu’ils ont fait les sots.

VALÈRE.

Mais, dans peu...

PHILIPIN.

Ce dans peu, pour eux, n’est qu’une fable ;

Ils nous tiennent tous deux plus fourbes que le diable.

D’ailleurs, à notre auberge où nous allons manger,

Sur l’argent, à tous coups, ils me font enrager :

Le maître, les valets, la fille et la maîtresse,

Sur ce chapitre-là, me tourmentent sans cesse ;

Et je crains qu’à la fin, une mauvaise humeur

Ne nous fasse dîner, ou bien souper par cœur.

VALÈRE.

Qu’ils se donnent du moins un peu de patience.

PHILIPIN.

C’est trop longtemps pour eux conter la même chance ;

Ils veulent de l’argent.

 

 

Scène II

 

LISIMON, VALÈRE, PHILIPIN

 

 

PHILIPIN, bas.

Mais voici Lisimon ;

Il lui faut emprunter...

VALÈRE, bas.

C’est assez, j’entends.

PHILIPIN, bas.

Bon.

LISIMON, à Valère.

Je venais te chercher.

VALÈRE, à Lisimon.

Si c’est pour ton service,

Parle-moi franchement ; j’agis sans artifice

As-tu besoin de moi ?

LISIMON.

Je te suis obligé.

VALÈRE.

Dis-moi, quelque faquin t’aurait-il outragé ?

Parle, je suis à toi.

LISIMON.

Je te rends mille grâces.

VALÈRE.

Vois-tu ! je ne suis point de ces gens à grimaces.

LISIMON.

Oh ! je le fais fort bien.

VALÈRE.

Je suis franc.

LISIMON.

Je le crois.

Tu peux, avec raison, en croire autant de moi ;

Je te suis tout acquis.

VALÈRE.

Je n’en suis point en peine.

Laissons ces compliments ; dis-moi ce qui t’amène ;

LISIMON, riant.

Volontiers.

PHILIPIN, à part.

Écoutons.

LISIMON.

Je viens pour t’avertir

Que, ce soir, avec toi, je veux me divertir.

VALÈRE.

Je ne puis pour ce soir ; car j’attends compagnie.

LISIMON.

Je le sais : mais Célide est sans cérémonie :

Elle-même m’a dit qu’elle soupait ici,

Et m’a sollicité de m’y trouver aussi.

Je t’en viens avertir, de crainte de surprise ;

Elle m’a dit aussi d’amener Cidalise.

PHILIPIN, à part.

Courage !

LISIMON.

Qu’en dis-tu ?

VALÈRE.

Je n’en fuis point fâché.

LISIMON.

Je me sens aujourd’hui l’humeur d’un débauché :

Je veux me réjouir, pour bannir de mon âme

Un importun chagrin.

VALÈRE.

Est-ce pour quelque Dame ?

LISIMON.

Non.

PHILIPIN, bas, à Valère.

Songez-vous donc... ?

VALÈRE, bas à Philipin.

Oui.

À Lisimon.

Mais d’où vient ton chagrin ?

LISIMON.

J’ai perdu mon argent.

PHILIPIN, à part.

Serviteur au festin ;

Il n’est plus question maintenant de demande.

VALÈRE, à Lisimon.

J’en suis fâché. Dis-moi, ta perte est-elle grande ?

LISIMON.

Eh !... non ; mais j’ai pensé quasi devenir fou ;

J’ai perdu, sans gagner, jusques au dernier sou.

PHILIPIN, à Valère.

Offrez-en à Monsieur.

LISIMON.

Ah ! non ; je lui rends grâces.

PHILIPIN, à Lisimon.

Parlez ; Monsieur n’est oint de ces gens à grimaces :

Il est franc.

LISIMON.

Je le sais. Adieu, jusqu’à ce soir ;

Nous viendrons de bonne heure.

VALÈRE.

Adieu.

PHILIPIN, faisant la révérence.

Jusqu’au revoir.

 

 

Scène III

 

VALÈRE, PHILIPIN

 

VALÈRE, regardant Philipin qui ne branle pas.

Hé bien ! veux-tu songer à me sortir d’affaire ?

PHILIPIN.

Moi, Monsieur ?

VALÈRE.

Oui.

PHILIPIN.

Parbleu ! je ne saurais qu’y faire ;

Car j’ai de mon adresse épuisé tout le fond.

VALÈRE.

Tu veux donc qu’aujourd’hui je reçoive un affront ?

Et que Célide encor, pour cette bagatelle.

Durant un mois entier, me gronde et me querelle ?

Car tu sais que souvent son esprit emporté

Se cabre, pour un rien, jusqu’à l’extrémité.

Mais au moins, là-dessus, réponds-moi quelque chose.

PHILIPIN.

De tout cela, Monsieur, je ne suis point la cause ;

Je voudrais, de bon cœur, pouvoir vous soulager.

VALÈRE.

Tu me soulageras, en cherchant à manger.

PHILIPIN.

C’est temps perdu, Monsieur ; le monde est inflexible.

VALÈRE.

Mais, pour me contenter, fais au moins ton possible !

PHILIPIN.

Venez avecque moi, vous verrez si je mens ;

Et je veux, de grand cœur, souffrir mille tourments,

Si ce que je vous dis se trouve une chimère.

VALÈRE.

Mais que dire à Célide, et comment s’en défaire ?

PHILIPIN.

Feignez d’être malade, et mettez-vous au lit.

VALÈRE.

En cette occasion, tu manques bien d’esprits.

Ils viendront pour savoir quelle est ma maladie ;

Et faire, par leurs soins que l’on y remédie ;

Puis, me trouvant sans fièvre, et sans aucun danger,

Au soupé, de nouveau, ce serait m’engager ;

Outre qu’à déguiser je suis fort malhabile.

PHILIPIN.

De feindre quelque mal il n’est pas difficile.

VALÈRE.

Non ; mais de feindre ainsi, c’est l’emploi d’un faquin.

PHILIPIN.

Morbleu ! faites venir un fameux Médecin ;

Après, laissez-le faire : aidez au stratagème,

Il vous rendra malade, en dépit de vous-même ;

Avecque la saignée il en aura raison.

VALÈRE.

Tu sais que je la crains bien plus que le poison.

PHILIPIN.

D’accord. Si vous feigniez de vous être allé battre,

Je m’en irais chez eux faire le diable à quatre,

Dirais qu’un inconnu vous a fait un appel.

VALÈRE.

Un homme comme moi pourrait feindre un duel ?

Il y va de ma gloire ; et, d’ailleurs, cette feinte

Causerait à Célide une sensible atteinte ;

L’amour qu’elle a pour moi pourrait l’inquiéter.

PHILIPIN.

Bon ! bon ! continuez, vous allez tout gâter.

Je vois bien, vous voulez être homme de parole :

Ce désir est fort beau, quand on a la pistole ;

Mais il ne sert de rien, alors qu’on ne l’a pas.

VALÈRE.

Si faut-il, cependant, me tirer d’embarras.

PHILIPIN.

Oh ! pour vous en tirer, il faudrait des miracles :

Vous-même à mes conseils vous mettez des obstacles.

VALÈRE.

Point ; je n’agirai plus que par tes sentiments.

PHILIPIN.

Ne m’embarrassez point par vos raisonnements.

Allez, laissez-moi faire ; il me vient une idée,

Par où je tiens déjà la bécasse bridée.

VALÈRE, avec empressement.

Dis-la-moi.

PHILIPIN.

Je n’ai garde.

VALÈRE.

Hé ! pourquoi me cacher... ?

PHILIPIN.

Je ne la dirai point : vous avez beau prêcher,

Vous n’en apprendrez rien, qu’après la chose faite.

VALÈRE.

Mais enfin, si c’était quelque sotte défaite...

PHILIPIN.

Hé ! non.

VALÈRE.

Mais raisonnons...

PHILIPIN.

Ah ! ne raisonnons plus ;

Ventrebleu ! quittez-là vos raisons de bibus.

VALÈRE.

À tout ce que tu veux il faut donc me soumettre ?

PHILIPIN.

Il fallait raisonner avant que de promettre,

Et ne pas, sans biscuit, s’embarquer follement,

Morbleu ! de quoi vous sert votre grand jugement ?

Laissez-moi seul.

VALÈRE.

Pourtant...

PHILIPIN.

Hé ! laissez-moi, vous dis-je ;

Votre discours, ici, m’importune et m’afflige.

Rentrez.

VALÈRE.

Je ne veux pas...

PHILIPIN, allant au fond du Théâtre.

Oh ! pour moi, je vous suis.

VALÈRE.

Rentrons ; il faut souffrir, en l’état où je suis.

 

 

Scène IV

 

PHILIPIN, seul

 

Or çà, voyons un peu si ce que je projette

Peut être apparemment une honnête défaite.

Après avoir un peu rêvé.

Oui ; rien, selon mon sens, n’est mieux imaginé ;

Et, sans cela, mon Maître allait être berné.

Ah ! qu’un Valet d’esprit est une belle chose !

Il sait répondre juste à ce qu’on lui propose ;

Et, si pour quelqu’affaire il faut un prompt secours,

Dans les occasions on le trouve toujours.

Quelque jour, à mon tour, je prétends être Maître ;

Mais je veux un Valet qui sache se connaître ;

Il ne coûte pas plus d’avoir un bon cheval,

Que d’avoir à nourrir un méchant animal.

Si mon Maître, après tout, dedans cette occurrence,

Eût eu quelque Valet de peu d’intelligence,

Où diable en ferait-il en cette extrémité ?

Branlant la tête.

Ma foi... Mais achevons ce que j’ai projeté.

Il frappe à la porte de Célide.

 

 

Scène V

 

DORISE, PHILIPIN

 

DORISE, ouvrant.

Ah ! c’est toi ? Que veux-tu ?

PHILIPIN.

Parler à ta Maîtresse.

DORISE.

À Célide ?

PHILIPIN.

À qui donc ?

DORISE.

Est-ce affaire qui presse ?

PHILIPIN.

Hé ! non pas.

DORISE.

Voudrais-tu m’apprendre ce que c’est ?

PHILIPIN.

Oui ; tu sais que toujours je fais ce qui te plaît.

DORISE.

Dis-le donc promptement ; Célide va descendre.

PHILIPIN.

Je viens lui demander l’heure qu’on doit l’attendre,

Afin qu’à point nommé le soupé soit tout prêt ;

Car mon Maître, vois-tu ! fait lui fort grand apprêt.

DORISE.

Tant mieux ; car, vois-tu bien ! le grand festin me touche.

PHILIPIN.

Peste ! à ce mot de grand, l’eau te vient à la bouche.

DORISE.

Il est vrai.

PHILIPIN.

C’est assez.

DORISE.

Cela me satisfait :

J’aime qu’on ait grand air à tout ce que l’on fait ;

J’ai le goût bon.

PHILIPIN.

J’entends ; quoi que tu te proposes,

Ton esprit, en tous lieux, est pour les grandes choses.

M’aimes-tu grandement ? Expliquons-nous enfin.

DORISE.

Silence sur l’amour, et parlons du festin.

PHILIPIN.

Le soupé fera beau.

DORISE.

Vois-tu ! je te déclare

Qu’à souper comme il faut, aussi je me prépare.

Surtout, que nous ayons quelque vin de liqueur.

PHILIPIN.

Oui.

DORISE.

Fais faire un ragoût qui nous touche le cœur,

L’entremets fin, la bisque où le ris de veau nage,

Et je t’en aimerai quatre fois davantage.

PHILIPIN.

Si bien que ton amour est un amour gourmand ;

Et, sans tous ces ragoûts, serviteur à l’amant.

DORISE.

Point d’amour, sans cela.

PHILIPIN.

Sans daube, entremets, bisque,

À t’entendre parler, notre amour court grand risque.

DORISE, le caressant.

Ce n’est pas qu’après tout, je n’aime tes appas.

PHILIPIN.

Après tout ? J’entends bien ; même après le repas.

DORISE.

Tu vas te chagriner, pour un mot de gogaille ?

PHILIPIN.

Point.

DORISE.

Je t’aime toujours.

PHILIPIN.

Oui-dà ! vaille que vaille.

DORISE.

J’entends Célide, paix.

PHILIPIN.

J’espère qu’à la fin...

 

 

Scène VI

 

CÉLIDE, DORISE, PHILIPIN

 

CÉLIDE.

Dorise, que fais-tu ?

DORISE.

Je parle à Philipin.

CÉLIDE.

Que veut-il ?

DORISE.

Pour souper, il vient prendre votre heure.

CÉLIDE, à Philipin.

T’envoie-t-on exprès ?

PHILIPIN, à Célide.

Oui, Madame, ou je meure.

CÉLIDE.

Pour m’y rendre au plutôt, je ferai mon pouvoir.

N’as tu rien davantage à me faire savoir ?

PHILIPIN.

Non ; mais si j’osais...

CÉLIDE.

Quoi ?

Philipin branle la tête.

DORISE, à Philipin.

Pourquoi branler la tête ?

Parle-nous franchement, et ne fais point la bête.

PHILIPIN, à Dorise.

Hé ! ce n’est rien.

DORISE.

Pourtant tu me parais fâché.

Ton Maître, pour quelque autre, a-t-il le cœur touché ?

Dis.

PHILIPIN.

Ah ! non, je t’assure.

CÉLIDE, à Philipin.

Hé bien ! je t’en veux croire ;

Mais d’où vient cette humeur et si sombre et si noire ?

PHILIPIN, à Célide.

Votre seul intérêt me cause cette humeur ;

Et la chose, en un mot, regarde votre honneur.

CÉLIDE.

Mon honneur !

PHILIPIN.

Oui.

CÉLIDE.

Comment ? dis.

DORISE.

Cela ne peut être.

Là, dis donc.

PHILIPIN.

Je crains trop qu’on le dise à mon Maître.

CÉLIDE.

Dis, n’aie aucune peur.

PHILIPIN.

Me le promettez-vous ?

CÉLIDE.

Oui.

PHILIPIN.

Je ne puis souffrir que vous veniez chez nous.

Franchement.

CÉLIDE.

Hé ! pourquoi ?

PHILIPIN.

C’est que chacun en cause.

DORISE.

Si ce n’est que cela, c’est vraiment peu de chose.

PHILIPIN.

L’autre jour, un voisin qui vous en vit sortir,

Lâcha mille propos d’aimer, de divertir ;

Bref, pour vous couper court, il me dit cent sottises.

Là-dessus, aussitôt, nous en vînmes aux prises,

Et je finis la chose avec cent coups de poing.

CÉLIDE.

Après ce que tu dis, je n’y retourne point.

DORISE, à Célide.

Nous n’irons pas souper ?

CÉLIDE, à Dorise.

Non.

DORISE.

Pourquoi non, Madame ?

CÉLIDE.

Veux-tu que derechef un coquin me diffame ?

DORISE.

Son Maître vous attend avec de grands apprêts.

CÉLIDE.

Son Maître, là-dessus, prend peu mes intérêts ;

Devrait-il m’inviter d’aller à sa demeure,

Après ?...

PHILIPIN.

Il n’en sait rien. Madame, ou que je meure.

Peste ! s’il le savait, ses voisins médisants.

Dans peu, sur mon honneur, passeraient mal le temps.

CÉLIDE, à Philipin.

Il ferait ce qu’il doit.

PHILIPIN.

Oh ! Madame, sans doute ;

Là-dessus, il est homme à tout mettre en déroute.

J’ai toujours craint depuis, que vous vinssiez chez nous,

De peur qu’un de ces gens ne vous mît en courroux ;

Que, vous voyant entrer, leur médisante langue

Ne vous fît, en passant, quelque sotte harangue ;

Que mon Maître, à la fin, venant à tout savoir,

D’abord, pour vous venger, n’écoutât son devoir.

En ces occasions l’on frappe, l’on assomme ;

Et pour moins, bien souvent, il arrive mort d’homme.

CÉLIDE.

Pour moi, je ne veux pas causer un tel malheur.

DORISE, à Philipin.

Je te tiens là-dessus un aussi grand hâbleur...

CÉLIDE.

Enfin je n’irai point, la chose est résolue.

DORISE.

Puisqu’ainsi, par raison, cette affaire est conclue ;

Qu’il fasse donc chez nous apporter le soupé.

CÉLIDE.

D’accord.

PHILIPIN, à part.

C’est à ce coup que je suis attrapé.

DORISE.

Par-là, vous évitez toute la médisance :

Et vous ferez la chose avecque bienséance.

CÉLIDE, après avoir rêvé.

Je ne veux point souper ; qu’on ne l’apporte pas.

DORISE.

D’où vient ?

CÉLIDE.

Cela ferait un trop grand embarras.

DORISE.

Mais rien n’est plus aisé.

CÉLIDE.

Mais je n’en veux rien faire ;

Cesse de m’en parler.

DORISE.

Mais que dira Valère ?

De toutes les façons, c’est trop le mépriser.

Quel prétexte aurez-vous pour vous en excuser ?

Encor doit-on trouver une défaite honnête.

CÉLIDE.

Je feindrai, pour excuse, un fort grand mal dé tête.

DORISE.

Ce mal, à mon avis, viendra fort brusquement.

PHILIPIN.

Ce mal assez souvent survient en un moment ;

C’est, à mon sentiment, une valable excuse :

Puis, je prendrai le soin d’appuyer cette ruse.

CÉLIDE, à Philipin.

Songe bien...

PHILIPIN.

Là-dessus, mettez-vous en repos.

DORISE, à part.

Je voudrais de bon cœur qu’on te brisât les os.

PHILIPIN, à Célide.

Mais, au moins, le secret ?

CÉLIDE.

Vas, que rien ne t’alarme.

PHILIPIN.

Car j’aurais à souffrir un étrange vacarme.

CÉLIDE.

Hé ! mon Dieu ! là-dessus, n’aie point de souci.

PHILIPIN.

Soit. Adieu donc.

CÉLIDE.

Adieu.

PHILIPIN, à part.

La chose a réussi ;

Mon Maître est dégagé par cette fourberie.

 

 

Scène VII

 

CÉLIDE, DORISE

 

CÉLIDE.

Dorise, qu’en crois-tu ?

DORISE.

Ce n’est que menterie,

Qu’un conte assurément qu’il a fait à plaisir.

Que de m’en éclaircir, j’aurais un grand désir !

CÉLIDE.

Je pense que Valère a part au stratagème.

DORISE.

Tout de bon ?

CÉLIDE.

Tout de bon.

DORISE, après avoir un peu rêvé.

Je le pense de même.

Philipin, de son chef, s’irait-il ingérer

De rompre une partie et de vous censurer ?

CÉLIDE.

Le Maître et le Valet ont tramé cette pièce ;

Mais je vaux découvrir pourquoi cette finesse :

Je ne puis y penser dans me mettre en courroux ;

Je sens naître en mon cœur des sentiments jaloux.

J’ai sujet maintenant de douter de Valère ;

Ce procédé, vois-tu ! cache quelque mystère.

DORISE.

Mais Valère vous aime.

CÉLIDE.

Hé ! mon dieu ! que fait-on ?

DORISE.

Qui pourrait-il aimer ?

CÉLIDE.

Tu sais que Lisimon

Y doit souper, ce soir, avecque Cidalise.

DORISE.

Valère, de l’aimer, ferait-il la sottise ?

CÉLIDE.

Dorise, on doit tout craindre, alors qu’on aime bien.

DORISE.

Oui, vous avez raison, et je ne dis plus rien.

Cidalise cet jolie et souffre la fleurette,

Et paraît être fille à faire une amourette.

CÉLIDE.

Pour me guérir l’esprit, j’y veux aller souper.

DORISE.

Ma foi, par ce moyen, on les peut attraper,

Observer leur grimace, étudier leur geste...

Allons-y seulement, je me charge du reste.

CÉLIDE.

Je crois qu’en me voyant, ils seront bien surpris.

DORISE.

Ah ! que je vais tantôt pénétrer leurs esprits.

Lire jusqu’en leurs cœurs, voir jusqu’au fond de l’âme,

Découvrir leurs secrets ! Mais allons-y, Madame ;

Je veux de Cidalise, afin de tout savoir,

Prendre à part la Suivante, et faire mon devoir.

CÉLIDE.

Aime-t-elle à jaser ?

DORISE.

C’est fort vice ordinaire ;

Sur son chapitre même elle a peine à se taire.

Elle est de ces esprits qui, sans considérer,

Se plaisent à parler, médire et déchirer :

Quand l’occasion s’offre, ils n’épargnent personne ;

Ils passent par leur langue et la belle et la bonne ;

L’honneur, le bien, le mal, tout se confond chez eux ;

Et qui s’en sauve enfin, n’est pas trop malheureux.

CÉLIDE.

Ces esprits font souvent des sottises extrêmes.

DORISE.

Ils parlent du prochain, ou bien parlent d’eux-mêmes ;

Jamais sur leurs débours nulle réflexion...

 

 

Scène VIII

 

LISETTE, CÉLIDE, DORISE

 

CÉLIDE, à Dorise, montrant Lisette.

La voici.

DORISE, à Célide.

Bon.

CÉLIDE.

Sers-toi de cette occasion.

DORISE.

Laissez-nous seulement, c’est une affaire faite.

CÉLIDE, à Lisette.

Que vois-je ? Ah ! c’est donc toi ? Qui t’amène, Lisette ?

LISETTE, à Célide.

Je viens vous avertir que Madame, ce soir ;

Va souper chez Valère, et prétend vous y voir.

CÉLIDE.

Lisimon, de ma part, l’en a sollicitée ?

LISETTE.

Au moins, de cet honneur Madame s’est flattée.

CÉLIDE.

L’honneur en est pour moi ; mais, Lisette, dis-lui

À Dorise.

Qu’elle y soit de bonne heure. Adieu. Viens.

DORISE, à Célide.

Je vous suis,

Madame.

 

 

Scène IX

 

DORISE, LISETTE

 

DORISE.

Hé bien, Lisette ?

LISETTE.

Ah ! Dorise, j’espère

Que ce soirs, à soupé, nous ferons bonne chère.

N’est-ce pas ta pensée ?

DORISE.

Il n’en faut point douter.

LISETTE.

Valère est délicat, et sait fort bien traiter.

DORISE.

Sans doute.

LISETTE.

Je l’estime, et j’aime sa franchise.

DORISE.

Il a souvent, je crois, régalé Cidalise.

LISETTE.

Non pas ; mais l’autre jour il fit, en in-promptu,

Un merveilleux repas, qu’il nommait ambigu ;

Rien n’était plus galant... Enfin j’aime Valère ;

Et, dans tout ce qu’il fait ; il a l’heur de me plaire.

DORISE.

Plaît-il à ta Maîtresse autant comme il te plaît ?

LISETTE.

Pour moi, sur l’amitié, je ne sais ce qu’elle est ;

Je n’en puis que juger. Ma foi, hors elle-même,

Elle aurait de la peine à dire ce qu’elle aime.

DORISE.

Chacun croit cependant qu’elle aime Lisimon.

LISETTE.

Et moi, je n’en crois rien.

DORISE.

Tout de bon ?

LISETTE.

Tout de bon.

DORISE.

Mais dis-m’en la raison.

LISETTE.

Elle s’est mis en tête

Que sa beauté doit faire une illustre conquête ;

Que l’époux qu’elle aura doit être grand Seigneur.

DORISE.

S’il est vrai, Lisimon lui touche peu le cœur.

LISETTE.

Certain fou, qui des gens dit la bonne aventure,

Lui fait de sa fortune une heureuse peinture ;

Elle l’écoute enfin, et donne là-dedans.

Je voudrais, de ce fou, pouvoir casser les dents.

DORISE.

Il faut que ta Maîtresse ait l’âme bien crédule ;

Pour croire aux sots discours d’un devin ridicule.

LISETTE.

Elle n’est pas l’unique ; et j’en fais plus d’un cent

Qui, sur ses pronostics, en croient bien autant.

Ce fou, par jour, au moins en dupe une douzaine :

D’aller en son logis, ces sottes ont la peine ;

Et, comme homme important, se faisant rechercher,

Impose à leurs museaux la loi de se cacher ;

Et, de son grand savoir, faisant valoir la dose.

Débite effrontément, pour beaucoup, peu de chose.

DORISE.

Mais quand on est chez lui, dis-moi ce qu’on y fait.

LISETTE.

Seul à seul il les mène en un grand cabinet :

Elles montrent leur main, pour la Chiromancie,

Puis ensuite leur pied, pour la Pédomancie.

Quand, sur ces deux endroits, le fourbe a bien prêché,

Il conclu qu’aux tétons certain signe est caché ;

Que plus haut, ou plus bas, fait grande différence ;

Qu’il ne peut, sans les voir, tirer de conséquence.

Bref il trouve à parler sur l’un et l’autre bout ;

Et, si l’on le croyait, le drôle verrait tout.

DORISE.

As-tu passé, dis-moi, par les mains de cet homme ?

LISETTE.

Qui ? moi ! J’aimerais mieux aller, pieds nus ; à Rome.

DORISE.

Tu n’es pas peu savante, et je présume bien...

LISETTE.

Je te jure, ma foi, qu’il n’en fut jamais rien.

DORISE.

Mais tu sais le détail de chaque circonstance ?

LISETTE.

Ma Maîtresse dix fois m’en a fait confidence.

DORISE.

On devrait bien punir ces sortes de faquins.

LISETTE.

Mille coups siéraient bien à ces fieffés coquins.

Adieu, jusqu’à tantôt ; nous dirons autre chose.

DORISE.

Adieu, Lisette, adieu.

LISETTE.

Mais, au moins, bouche close.

 

 

Scène X

 

VALÈRE, PHILIPIN

 

PHILIPIN.

Hé bien ? que dites-vous de mon invention ?

Ne répond-elle pas à votre intention ?

VALÈRE.

À ne te point mentir, je la trouve admirable,

Pourvu qu’envers les gens je ne sois point blâmable.

PHILIPIN.

Du côté de Célide on ne peut vous blâmer ;

Et du reste, Monsieur, l’on doit peu s’informer.

VALÈRE.

Vas dire à Lisimon, qu’il mande à Cidalise

Que, pour une autre fois, là partie est remise,

Que Célide est malade.

PHILIPIN, s’en allant.

Oui, j’y vais de ce pas.

VALÈRE, l’arrêtant.

Fais-lui mes compliments.

PHILIPIN.

Je n’y manquerai pas.

VALÈRE.

Fais-lui bien que...

PHILIPIN.

Mon Dieu ! j’ai de l’intelligence,

Avouez que, sans moi, votre haute imprudence

Allait de bien des gens vous faire bafouer.

VALÈRE.

Sans toi, j’étais tondu, je le dois avouer.

J’aurais reçu, sans doute, un affront effroyable.

PHILIPIN.

Un Valet de bon sens est un meuble impayable ;

Et ce bon sens, surtout, se rencontre chez moi.

VALÈRE.

On ne peut trop payer un Valet comme toi.

Mais laissons ces propos, et cours où je t’envoie.

PHILIPIN, s’en allant.

Oh ! j’y vais.

 

 

Scène XI

 

CÉLIDE, DORISE, VALÈRE, PHILIPIN

 

PHILIPIN, à part, apercevant Célide.

Mais que vois-je ? Ah ! voici rabat-joie.

VALÈRE.

Ah ! Madame, c’est vous ? Philipin m’avait dit...

PHILIPIN.

J’ai dit la vérité.

DORISE, bas à Célide.

Comme il est interdit !

VALÈRE.

Il m’avait assuré qu’une forte migraine...

CÉLIDE, à Valère.

Il vous avait dit vrai ; que rien ne vous surprenne :

Elle est diminuée ; et, pour la divertir,

J’ai jugé qu’il était à propos de sortir,

De chercher compagnie, et fuir la solitude.

VALÈRE.

Vous me causez, par-là, beaucoup d’inquiétude :

J’étais de votre mal si fort persuadé,

Que, sur ce qu’il m’a dit, j’ai tout contremandé.

À Philipin.

N’est-il pas vrai ? parle.

PHILIPIN.

Oui.

DORISE, bas à Célide.

Madame, il vous déguise.

CÉLIDE, à Valère.

Vous aviez Lisimon, avecque Cidalise.

VALÈRE.

Par votre ordre, il est vrai que je les attendais ;

Mais, vous ne venant point, je les contremandais.

CÉLIDE.

Un plat nous suffira, sans tant se mettre en peine.

VALÈRE.

Mais s’ils viennent, Madame... ?

CÉLIDE.

Ah ! que rien ne vous gène.

VALÈRE.

Un pareil traitement est un peu familier.

CÉLIDE.

Hé bien ! à tout cela l’on peut remédier ;

Commandez...

VALÈRE.

S’il vous plaît, remettons la partie ;

Rien n’étant préparé...

CÉLIDE.

Sans plus de repartie,

Qu’on ait ce qu’on pourra, je veux souper ici.

VALÈRE.

Mais j’ai honte...

CÉLIDE.

Hé ! mon Dieu ! n’ayez aucun souci.

VALÈRE.

Faire un méchant repas, est chose assez fâcheuse.

CÉLIDE.

Ordonnez seulement.

PHILIPIN, à part.

L’incommode soupeuse !

VALÈRE, à Philipin.

Vas donc, puisqu’il lui plaît, nous chercher un morceau.

PHILIPIN.

On vous fera, Madame, un fort méchant cadeau.

Voyez-vous ! je suis franc, autant qu’on le peut être ;

Vous feriez, remettant, grand plaisir à mon Maître ;

Car...

 

 

Scène XII

 

LISIMON, CIDALISE, VALÈRE, CÉLIDE, DORISE, PHILIPIN

 

VALÈRE.

Voici Cidalise avecque Lisimon.

CIDALISE, embrassant Célide.

Je viens souper ici.

PHILIPIN, à part.

Peste de la guenon !

CIDALISE.

C’est par votre ordre, au moins.

CÉLIDE.

Je vous suis obligée.

CIDALISE.

On m’attendait ailleurs, je me suis dégagée,

Pour avoir le plaisir de souper avec vous.

CÉLIDE.

Ce soin à mon égard est obligeant et doux.

CIDALISE.

Je me sens, de vous plaie, une ardeur sans égale !

LISIMON.

Laissons les compliments, passons dans l’autre salle ;

Vous y pourrez jouer, attendant le soupé.

PHILIPIN, à part.

Ils attendront longtemps, ou je suis fort trompé.

CIDALISE.

J’ai fort grand appétit.

VALÈRE, entrant avec elles.

Vous aurez peu de chose ;

Le soupé sera maigre, et Madame en est cause.

 

 

Scène XIII

 

PHILIPIN, seul

 

Et bien plus maigre encor qu’ils ne s’attendent pas ;

Ils n’ont fait, de leur vie, un si léger repas.

Mais que prétend mon Maître? il entre, sans rien dire :

Il a fait la folie ; hé ! morbleu, qu’il s’en tire ;

Je suis un plaisant fat, de m’en inquiéter ;

Il ne s’en émeut pas, pourquoi m’en tourmenter ?

 

 

Scène XIV

 

VALÈRE, PHILIPIN

 

VALÈRE.

Philipin ?

PHILIPIN.

Monsieur.

VALÈRE.

Dis, que faut-il que je fasse ?

PHILIPIN.

Plus j’y rêve, Monsieur, et plus je m’embarrasse ;

Car tous vos créanciers me traitent d’affronteur.

VALÈRE.

Quoi ! tu ne peux fléchir ce Monsieur le Traiteur ?

PHILIPIN.

N’espérez rien de lui, si ce n’est invective :

J’ai même, dès tantôt, fait une tentative ;

Et sa réponse était : « De l’argent, de l’argent ;

Ou, dans peu, tu verras à ta queue un Sergent ».

VALÈRE.

Que faire de ces gens ?

PHILIPIN.

Moi, je ne fais qu’en faire :

C’est à vous d’y songer, Monsieur, c’est votre affaire.

VALÈRE.

Je voudrais, de bon cœur, qu’ils fussent hors d’ici.

PHILIPIN.

Quoi ! n’est-ce que cela qui vous met en souci ?

VALÈRE.

Non.

PHILIPIN, mettant le doigt au front.

Oh ! j’ai là-dedans, une bonne visée,

Pour les faire sortir ; je tiens la chose aisée.

Feignez un grand chagrin, avec un peu d’effroi,

Et du reste, Monsieur, reposez vous sur moi.

VALÈRE.

Mais pourquoi feindre ainsi ?...

PHILIPIN.

Monsieur, point de conteste ;

Moi, j’entre là-dedans, pour achever le reste.

 

 

Scène XV

 

VALÈRE, seul

 

Que diable va-t- il faire, et quel est son dessein ?

Plus je veux y rêver, et plus j’y rêve en vain.

Je ne puis deviner quel est son artifice ;

Je crains qu’il ne me rende un fort mauvais office.

 

 

Scène XVI

 

VALÈRE, PHILIIPIN, LISIMON, CIDALISE, CÉLIDE, DORISE

 

CÉLIDE, sortant.

Quoi ! mon frère est blessé ? Philipin, l’as-tu vu ?

PHILIPIN.

Non pas ; mais on le dit.

CÉLIDE.

Et comment l’as-tu su ?

PHILIPIN.

Je viens de le savoir au coin de notre rue.

CÉLIDE.

Mais de qui ? dis.

PHILIPIN.

D’un tas de populace émue.

Oyant nommer son nom, par curiosité,

Pour voir ce que c’était, je me suis transporté.

L’un disait qu’il avait une grande blessure ;

L’autre plaignait, d’ailleurs, sa funeste aventure ;

Chacun de son malheur parlait confusément.

CÉLIDE, à Dorise.

Ma cape.

PHILIPIN, à part.

Bon.

CÉLIDE.

Allons, ma cape promptement.

Dorise donne à Célide sa cape.

CÉLIDE, à Valère.

Ne m’abandonnez point, en ce malheur extrême.

VALÈRE, la prenant par la main.

Je n’ai garde.

LISIMON, à Célide.

Arrêtez ; car le voici lui-même.

 

 

Scène XVII

 

LISIMON, VALÈRE, CÉLIDE, CIDALISE, LE FRÈRE de Célide, PHILIPIN, DORISE

 

CÉLIDE.

Mon frère, on nous a dit que vous étiez blessé.

LE FRÈRE.

Celui qui vous l’a dit, n’est pas trop bien sensé ;

Je n’ai pas, que je sache, eu la moindre querelle.

Mais qui vous a conté cette fausse nouvelle ?

CÉLIDE.

Philipin.

LE FRÈRE.

Philipin ! Hé ! de qui le sait-il ?

Sans raison, bien souvent, le peuple a grand babil,

Au coin de notre rue, on disait, d’assurance,

Qu’un coup assez fâcheux vous traversait la panse ;

On nommait votre nom, et l’on vous figurait

De grosseur, de grandeur, bref, tout comme on vous voit.

LE FRÈRE.

Du moins, jusqu’à présent, j’y vois peu d’apparence.

PHILIPIN.

On peut s’être trompé, sur quelque ressemblance :

Puis, ne savez-vous pas qu’il est, soir et, matin,

Plus d’un âne au marché, qui se nomme Martin.

CÉLIDE.

On ne vous a point vu de toute la journée.

LE FRÈRE.

J’ai passé chez Daphné toute la matinée ;

Puis à l’Académie, où j’ai longtemps été.

CÉLIDE.

On vous a fait jouer ?

LE FRÈRE.

Oh ! non ; car j’ai prêté

Mon argent, en entrant.

CÉLIDE.

Ah ! la raison est forte.

Mais, à venir ici, quelle affaire vous porte ?

LE FRÈRE.

On m’a dit, au logis, que vous soupiez ici ;

Ne pouvant souper seul, j’y viens souper aussi.

PHILIPIN, à part.

Les marchands s’amassant, la foire sera bonne.

VALÈRE, aux Convives.

Entrez là-dedans.

CÉLIDE.

Oui, car il faut qu’il ordonne.

LE FRÈRE.

Valère, au moins, pour moi, point de mets superflus.

VALÈRE.

Non.

LE FRÈRE, en entrant.

Car, une autre fois, je n’y reviendrais plus.

 

 

Scène XVIII

 

VALÈRE, PHILIPIN

 

VALÈRE.

Philipin ?

PHILIPIN.

Monsieur.

Valère, par signes et par gestes, témoigne à Philipin l’humeur qu’il a des gens qui sont chez lui. Philipin lui répond de même.

VALÈRE.

Hem ? Quoi donc ! toujours se taire !

PHILIPIN.

Qu’ai-je à dire, Monsieur, quand tout est sa contraire

D’ailleurs, je vois, morbleu ! mon artifice à bout ;

Puis il survient toujours des obstacles à tout.

VALÈRE.

Je suivrais tes avis, quoi que tu me proposes ;

Pour m’ôter d’embarras, je ferai toutes choses ;

De l’affront que je crains, je me veux garantir.

Cherche, invente un moyen de les faire sortir.

PHILIPIN.

Attendez, j’en trouve un...

VALÈRE, avec empressement.

Dis vite, je t’écoutes.

PHILIPIN.

Mettons le feu céans, ils sortiront sans doute ;

C’est un moyen bien sûr, et tous iront chez eux.

VALÈRE.

II est vrai qu’il est sûr ; mais il est dangereux.

PHILIPIN.

D’accord Morbleu, voici ma dernière ressource.

Feignez qu’on vous a pris ce matin votre bourse ;

Et que, chez les Traiteurs n’ayant aucun crédit,

Vous ne pouvez ce soir...

VALÈRE.

Je t’entends, il suffit ;

L’avis est assez bon ; mais je crains de déplaire,

Et que Célide, enfin, ne se mette en colère.

 

 

Scène XIX

 

LISETTE, VALÈRE, PHILIPIN

 

LISETTE, ouvrant la porte.

Monsieur, on vous demande.

PHILIPIN, bas, à Valère.

Ah ! vous voilà gâté.

VALÈRE, à Lisette.

J’y vais.

Lisette rentre dans l’appartement.

 

 

Scène XX

 

VALÈRE, PHILIPIN

 

VALÈRE.

Que dois-je faire, en cette extrémité ?

Ah ! je vais recevoir un affront effroyable.

PHILIPIN.

Monsieur, s’il ne tenait qu’à se donner au diable...

 

 

Scène XXI

 

LISETTE, VALÈRE, PHILIPIN

 

LISETTE, revenant.

Monsieur, on me renvoie.

VALÈRE.

Oh ! je ne puis encor ;

Rentrez.

Lisette rentre dans l’appartement.

 

 

Scène XXII

 

VALÈRE, PHILIPIN

 

PHILIPIN.

M’en croirez-vous, Monsieur ? prenez l’essor,

Sortez.

VALÈRE.

Je n’ose.

PHILIPIN.

Enfin, cherchez donc un remède.

 

 

Scène XXIII

 

LE TRAITEUR, VALÈRE, PHILIPIN

 

PHILIPIN, bas, à Valère.

Mais voici le Traiteur ; faites tant, qu’il vous aide.

LE TRAITEUR.

Monsieur, en peu de mots, il me faut de l’argent ;

Ou je vais, tout à l’heure, envoyer un Sergents.

VALÈRE.

Je vous contenterai, n’en soyez point en peine ;

Mais il vous faut encore attendre la quinzaine ;

Mon père arrivera dans dix ou douze jours ;

Puis...

LE TRAITEUR.

À d’autres, Monsieur ! ce sont-là vos détours ;

Votre Valet, cent fois, a donné de ces bourdes :

C’est nous prendre, en un mot, pour franches hapelourdes.

 

 

Scène XXIV

 

LE FRÈRE de Célide, LE TRAITEUR, VALÈRE, PHILIPIN

 

LE FRÈRE de Célide, ouvrant la porte.

Valère ? un mot.

VALÈRE, au Frère.

J’y vais.

Le Frère rentre dans l’appartement.

 

 

Scène XXV

 

LE TRAITEUR, VALÈRE, PHILIPIN

 

VALÈRE, au traiteur.

Fiez-vous sur ma foi,

Qu’en ce temps, vous aurez tout ce que je vous dois.

 

 

Scène XXVI

 

LE FRÈRE de Célide, LE TRAITEUR, VALÈRE, PHILIPIN

 

LE FRÈRE, revenant, à Valère.

On est, de vous parler, dans une impatience...

PHILIPIN, au Frère.

C’est qu’il parle au Traiteur.

LE FRÈRE, à Valère.

Au moins, point de dépense :

À quoi bon tant de mets ? il ne nous faut qu’un plat.

VALÈRE.

Bon : vous n’en aurez qu’un.

LE FRÈRE, au Traiteur.

Mais qu’il soit délicat.

Monsieur, sur le soupé, ne croyez point Valère.

Il n’est pas, maintenant, besoin de grande chère ;

Il ne nous faut qu’un plat, comme je vous ai dit.

VALÈRE, au Frère.

Laissez-nous.

LE FRÈRE.

Volontiers.

Philipin et le Frère entrent dans l’appartement.

 

 

Scène XXVII

 

VALÈRE, LE TRAITEUR

 

VALÈRE, au Traiteur.

Monsieur...

LE TRAITEUR.

Point de crédit.

Tous vos discours ne font que des contes frivoles :

Il me faut de l’argent, et non pas des paroles ;

Songez à m’en donner.

VALÈRE.

Ma foi, je n’en ai pas ;

Et, comme vous voyez, j’ai besoin d’un repas :

Faites-moi ce plaisir ; après, foi d’honnête homme,

Vous serez satisfait.

LE TRAITEUR.

Comme de l’autre somme.

C’est en vain me presser, vous perdez votre temps.

Adieu ; pensez bientôt à nous rendre contents.

 

 

Scène XXVIII

 

VALÈRE, seul, après avoir regardé de tous les côtés

 

Ou donc est Philipin ? Ah ! tout me désespère.

 

 

Scène XXIX

 

UN SERGENT, VALÈRE

 

LE SERGENT.

Monsieur ?

VALÈRE.

Que vous plaît-il ?

LE SERGENT.

Vous nomme-t-on Valère ?

VALÈRE.

Oui.

LE SERGENT.

Pour vous informer de mes intentions,

Je viens pour vous donner trois assignations.

VALÈRE.

Trois assignations ! Quelles gens les envoient ?

LE SERGENT.

Pour vous faire savoir les Bourgeois qui m’emploient,

Le premier de ces trois est un Marchand Gantier ;

Le second, Pâtissier ; l’autre, Cabaretier.

VALÈRE.

Avec d’honnêtes gens, autrement on en use.

Envoyer un Sergent !

LE SERGENT.

Je vous demande excuse ;

Pour vous, en cas pareil, j’en ferais tout autant.

VALÈRE.

Ah ! ce n’est pas de vous que je suis mécontent ;

Et...

LE SERGENT.

Souffrez que j’écrive un mot.

VALÈRE, à part.

Ah ! je déteste !

Au Sergent.

Si l’on le voit ici ! Dépêchez, soyez preste ;

Car j’ai hâte.

LE SERGENT, en écrivant.

C’est fait, Monsieur : c’est à regret...

VALÈRE.

Fort bien, je vous entends.

LE SERGENT, lui donnant les assignations.

Je suis homme discret.

VALÈRE.

Adieu, sortez.

LE SERGENT.

Je sors.

 

 

Scène XXX

 

VALÈRE, seul

 

Où diantre peut-il être ?

M’abandonner ainsi ! Tu le payeras, traître ;

Coquin, de mille coups je saurai te punir.

En l’état où je suis, que vais-je devenir ?

 

 

Scène XXXI

 

VALÈRE, PHILIPIN

 

PHILIPIN, revenant.

Ah ! parbleu ! pour ce coup, la Dame en a dans  l’aile.

VALÈRE.

Hé ! d’où viens-tu, faquin ?

PHILIPIN.

Hé quoi ! l’on me querelle,

Dans un temps où j’ai fait un tour d’homme d’esprit !

VALÈRE.

Est-ce qu’en ma faveur le Traiteur s’adoucit ?

PHILIPIN.

Vous allez voir, dans peu, l’effet de mon adresse.

VALÈRE.

Apprends-moi ce que c’est ; ne m’en fais point finesse.

PHILIPIN.

Pour vous débarrasser, apprenez que j’ai dit

Qu’en ce lieu...

 

 

Scène XXXII

 

CÉLIDE, CIDALISE, DORISE, LISIMON, LE FRÈRE de Célide, VALÈRE, PHILIPIN

 

LE FRÈRE, sortant, à Célide.

Mais, ma sœur...

CÉLIDE.

Mais, mon Frère, il suffit ;

Je n’y veux point rester, quoi que vous puissiez dire.

LE FRÈRE.

Mais...

CÉLIDE.

Mais, encore un coup, cela vous doit suffire ;

C’est prendre peu de soin de la santé des gens.

CIDALISE, à Valère.

Pour donner à souper, prenez mieux votre temps,

Monsieur, n’exposez plus les Dames de la sorte.

LISIMON, à Cidalise.

Ce n’est rien, demeurez.

CIDALISE, à Lisimon.

Non, il faut que je sorte.

Ah ! Madame, au plutôt abandonnons ce lieu.

CÉLIDE, à Cidalise.

Ah ! pour moi, je vous suis.

VALÈRE, à Célide.

Mais que je sache...

CIDALISE, à Valère.

Adieu.

À Lisimon.

Remenez-moi.

LISIMON.

D’accord.

LE FRÈRE, à Célide.

Ma sœur, cessez de craindre.

CÉLIDE.

Mon frère, là-dessus, je ne puis me contraindre.

Allons, venez.

LE FRÈRE.

Allons.

VALÈRE, à Célide.

Ne puis-je point savoir... ?

CÉLIDE.

Ah ! de plus de dix jours je ne veux point vous voir :

Éloignez-vous de moi. Dorise, allons, ma cape.

DORISE, donnant la cape.

La voilà.

CÉLIDE, prenant son frère.

Sortons vite.

DORISE.

Ah ! si l’on m’y rattrape...

VALÈRE.

Dorise, apprends-moi donc...

DORISE.

Ah ! ne m’approchez pas.

Les Convives sortent.

 

 

Scène XXXIII

 

VALÈRE, PHILIPIN

 

PHILIPIN.

Nous voilà délivrés d’un fort grand embarras.

VALÈRE.

Oui, sans doute.

PHILIPIN.

Et le tout vient de mon industrie ;

Mais savez-vous comment ?

VALÈRE.

Dis, vite, je te prie.

PHILIPIN.

La petite vérole a su vous dégager ;

La peur de la gagner les a fait déloger.

J’ai dit que, de ce mal, une fort belle femme,

Dans ce même logis, venait de rendre l’âme,

Et que j’étais rentré pour les en avertir.

Ces Dames, aussitôt, n’ont pensé qu’à sortir,

Et fuir cette maison ; vous l’avez-vu vous-même.

VALÈRE.

On ne pouvait trouver un meilleur stratagème.

PHILIPIN.

Monsieur sortons aussi, ne faisons point les fats ;

Ces deux Messieurs pourraient revenir sur leurs pas.

VALÈRE.

Ta raison est fort bonne, et je sors tout à l’heure.

 

 

Scène XXXIV

 

PHILIPIN, seul

 

Je conseille à chacun d’aller à sa demeure ;

Il y soupera mieux qu’il ne ferait ici :

Et moi, de mon côté, je vais souper aussi.

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