Nouveau prologue et nouveaux divertissements pour la Comédie de l’Inconnu (DANCOURT)

Comédie en cinq actes et un prologue.

Représentée pour la première fois le 20 août 1703.

 

Personnages du Prologue

 

THALIE, Muse

CRISPIN

MADEMOISELLE MIMY

MADEMOISELLE DESMARRES

MONSIEUR DE PONTEUIL

MONSIEUR SALLÉ

 

Personnages de la Comédie

 

LA COMTESSE

OLIMPE, aimée du Chevalier

LE MARQUIS, Amant de la Comtesse

LE CHEVALIER, Amant d’Olimpe

LE VICOMTE, Amant de la Comtesse

LA MONTAGNE, Valet de Chambre du Marquis

VIRGINIE, Suivante de la Comtesse

MÉLISSE, Suivante d’Olimpe

DEUX ENFANTS, représentants l’Amour et la Jeunesse

CASCARET, Laquais de la Comtesse

 

La Scène est dans le Château de la Comtesse.

 

 

PROLOGUE

 

 

Scène première

 

THALIE

 

Quelle favorable Puissance

A rétabli les agréments,

La pompe et la magnificence

D’un Théâtre que mon absence

Avait laissé sans ornements ?

Moi, qu’on nomme en tous lieux la divine Thalie,

Moi, Muse de la Comédie,

L’amour des plus rares esprits,

Je n’ai donc pu par leurs écrits

Soutenir l’honneur de la Scène ?

J’ai pris une inutile peine ?

Malgré les efforts que j’ai faits,

On a déserté mes Palais.

Depuis un temps une juste colère,

M’a fait abandonné ces lieux ;

Un retour de tendresse, un désir curieux,

De voir ce que sans moi l’on y peut encore faire,

Me fait y reporter et mes pas et mes yeux :

Je reviens, je n’y vois rien qui ne doive plaire.

Une foule de connaisseurs,

Par le bon goût au spectacle appelée,

Me fait penser que l’une de mes Sœurs

À ma place s’en est mêlée.

Se pourrait-il qu’à mon emploi

Elle réussit mieux que moi ?

 

 

Scène II

 

THALIE, CRISPIN

 

CRISPIN.

Dieu vous garde, Madame Thalie.

Hé depuis quand à Paris de retour ?

Je vous croyais en Italie,

Où vous aviez dit-on, fixé votre séjour.

THALIE.

N’est-ce pas là Crispin qui me parle ?

CRISPIN.

Lui-même.

Crispin cadet, fils de Crispin l’aîné,

Sous une heureuse étoile né,

S’il pouvait se flatter de la gloire suprême

D’être autant de vos favoris,

Que feu son père en fut jadis ?

Car il en fut beaucoup, à ce que j’entends dire.

THALIE.

Je l’ai favorisé, j’ai connu les talents.

Qu’il eût du Ciel pour faire rire,

Et pour plaire aux honnêtes gens :

Mais enfin depuis quelque temps

En termes assez bons on m’a parlé des vôtres,

Et l’on m’en a tant dit...

CRISPIN.

À d’autres.

Comme toujours de la Profession

L’amour propre fut l’apanage,

Ne me louez qu’avec précaution,

Je n’ai que trop de pente à la présomption,

Ne m’en donnez pas davantage.

THALIE.

La louange n’est pas mon fort,

La raillerie est mon partage.

CRISPIN.

Fort bien, vous me raillez, je gage,

Et j’ai donné dedans. J’ai tort.

D’autres que moi...

THALIE.

Laissons cette matière,

Et me dites un peu ce que l’on fait ici.

CRISPIN.

On fait tout ce qu’on peut pour plaire,

Et l’on est fort content quand on a réussi.

THALIE.

Arrive-t-il souvent que l’on y réussisse ?

Et pendant mon absence...

CRISPIN.

On s’est passé de vous,

Et pour peu qu’on nous applaudisse,

Nous redoublons nos soins, enfin nous sommes tous

Fort contents de Paris, quand Paris l’est de nous.

THALIE.

De bons Acteurs la Troupe est-elle bien fournie ?

CRISPIN.

Troupe, Madame ? on dit à présent Compagnie.

Malepeste ! Sur un bon pied

Nous avons mis la Comédie ;

Et si par quelque heureux génie

Le théâtre était appuyé ?

Car voyez-vous, j’ai l’âme la plus ronde,

Et ne sais point faire le fin.

Vous nous voyez aujourd’hui bien du monde,

Nous n’aurons personne demain.          

THALIE.

Comment donc, et qui peut produire

Chez vous cette inégalité ?

CRISPIN.

C’est que... Comprenez bien ce que je vais vous dire.

Une première fois par curiosité...

On vient voir en foule un ouvrage.

Quand... la première fois... on en est dégoûté...

On n’y revient pas davantage.

THALIE.

Cela se comprend aisément :

Mais à qui d’une Pièce attribuer la chute ?

CRISPIN.

On en parle différemment,

L’Auteur aux Acteurs l’impute,

Les Acteurs parlent autrement,

Le Parterre ordinairement

Est le Juge de la dispute ;

Et comme il juge sainement,

Il juge souverainement :

Ce qu’il a jugé s’exécute.

THALIE.

Vous avez de nouveaux Acteurs.

CRISPIN.

Oh ! beaucoup, presque autant que de nouveaux Auteurs.

Que l’un de nous quitte, ou trépasse,

Il en viendra quatre à sa place.

THALIE.

Cela vous fait plaisir.

CRISPIN.

Le proverbe le dit,

Plus on est de fous, plus on rit.

THALIE.

Le Proverbe est très véritable.

Mais, dites-moi de grâce, à ces Acteurs nouveaux

Le parterre est-il favorable ?

CRISPIN.

S’il ne leur était pas, ce serait bien le diable,

Nous n’avons presque plus de ces originaux,

Que vous aviez formés vous-même.

Grand changement d’un temps à l’autre y a,

Et quand on n’a pas ce qu’on aime,

Il faut bien aimer ce qu’on a.

Nous nous formons sur le meilleur modèle.

À vous faire la cour tous ardents comme moi,

Nous avons tous le même zèle

Pour réussir chacun dans son emploi.

THALIE.

Avec succès je crois que chacun s’en acquitte ;

Si par hasard la chose est autrement,

Le zèle tient lieu de mérite,

Et le public qui de l’orgueil s’irrite,

Aux modernes Acteurs se prête bonnement :

Quoiqu’il en soit, faites-les-moi connaître,

Je prétends les encourager ;

Et suivant ce qu’ils pourront être,

Je m’engage à les protéger.

CRISPIN.

N’est-ce point trop vous engager ?

THALIE.

Non, qu’ils viennent.

CRISPIN.

Holà, Monsieur Dufort, la France

Voyez si ces Messieurs, ces Dames sont là-haut.

Une Muse de connaissance,

Nous honore de sa présence,

Qu’ils accourent tous au plutôt,

Lui faire la révérence.

En voici deux nouveaux, c’est Ponteuil et Sallé.

 

 

Scène III

 

THALIE, CRISPIN et PLUSIEURS ACTEURS et ACTRICES

 

THALIE.

Melpomène ma sœur m’en a déjà parlé.

N’avez-vous pas le fils de la Thorillière ?

CRISPIN.

Oui, dont vous aimiez tant le père.

THALIE.

De mes faveurs je l’ai toujours comblé,

Et sa famille aussi me sera toujours chère.

CRISPIN.

Tant mieux. La famille a peuplé.

En voici de la jeune espèce.

Vous aimiez fort aussi, dit-on, la Champmeslé.

THALIE.

Assurément.

CRISPIN.

Hé bien, tenez, voilà sa nièce.

THALIE.

J’aime à voir dans cette jeunesse

Des Acteurs que j’aimais avec tant de tendresse

Le mérite renouvelé.

CRISPIN.

Mesdames, voilà la Déesse,

Par les faveurs de qui nos aïeux ont brillé.

MIMY.

À cet éclat, à cet air noble et tendre,

Je connais bien une Divinité :

Mais sans savoir son nom oserai-je prétendre

Qu’elle reçoive avec bonté

Les hommages qu’on vient lui rendre ?

THALIE.

Venez tous reconnaître en moi,

Une des Muses du Théâtre.

CRISPIN.

Allons gaiement, la Muse est gaillarde et folâtre,

Et le Comique est son emploi.

Entrée des Acteurs et des Actrices qui viennent saluer Thalie.

THALIE.

Vos Acteurs, à ce que je vois,

Ont presque tous du talent pour la danse ?

CRISPIN.

Fi donc, vous vous moquez, je crois ;

Ce n’est pas là danser, c’est marcher en cadence.

THALIE.

Quelqu’un de vous n’a-t-il pas de la voix ?

CRISPIN.

Pour chanter non. Il est vrai que parfois

Ils vous prennent un ton tendrement énergique,

Demi gaillard, demi tragique,

Une façon de réciter,

Qu’on prendrait pour de la Musique,

Quand le tour du Vers est Lyrique,

Ce diable de ton-là ne se peut éviter.

C’est un grand défaut au Comique.

THALIE.

Cette manière de récit

Sera pour moi toute nouvelle,

Et peut-être me plaira-t-elle :

La nouveauté quelque fois réussit.

Messieurs, que l’on me fasse entendre

Ceux en qui ce défaut est le moins vicieux.

CRISPIN.

Allons, Monsieur Sallé, du grand, du beau, du tendre,

De l’enjoué, du sérieux,

Quelque chose qui touche l’âme.

C’est assurément lui, Madame,

À qui sans contredit ce défaut sied le mieux.

Chanson de MONSIEUR SALLÉ.

Sombre forêt, aimable solitude,
Votre ombre impénétrable à la clarté du jour,
Ne l’est pas à l’inquiétude
Que me cause un funeste amour.
De l’inhumaine que j’adore
L’image me suit en tous lieux,
Et le cruel Amour la présente à mes yeux
Plus belle qu’elle n’est encore.

THALIE.

Cet Acteur a la voix touchante,

Et je suis tout à fait contente

De cette sorte de récit.

CRISPIN.

Elle ne me plaît point, moi, je trouve qu’il chante,

Et cependant le Public l’applaudit.

THALIE.

Vous pourriez, à ce qu’il me semble,

Réciter ainsi deux ensemble ?

CRISPIN.

Deux soit, n’allez pas jusqu’à trois ;

Car c’en serait trop à la fois.

Allons, Messieurs du Chromatique,

De l’enjouement avec du pathétique,

Et puis à peu près, là, sur le ton qu’ils prendront,

Pour ne pas rester à rien faire,

Les autres Acteurs marcheront,

Ou par-devant, ou par derrière,

Tantôt de biais, tantôt en rond.

Chanson de MESSIEURS SALLÉ et PONTEUIL.

Ô l’heureux jour !
Muse adorable,
Que ton retour
Nous est favorable !
Qu’il charme nos sens !
Vous qui de nos jeux innocents !
Faites un usage agréable,
Venez seconder nos désirs,
Venez partager nos plaisirs,
Approuvez nos efforts, approuvez notre zèle,
Et nous favorisez comme elle.

THALIE.

Vous récitez très galamment,

Et marchez tous légèrement

J’approuve fort cette manière,

Et sans aucun secours d’une main étrangère

Vous pourriez assez aisément

Mettre des Pièces d’agrément.

CRISPIN.

Des Pièces d’agrément sans Danse, sans Musique ?

Autant vaut fermer la Boutique.

MADEMOISELLE DESMARRES.

Pourquoi donc ? Nous venons de remettre Psyché,

Avec tout le succès qu’on s’en pouvait promettre.

CRISPIN.

Oui : mais au double il a fallu la mettre,

Et le Public s’en est presque fâché.

Demandez, demandez, hem...

MADEMOISELLE DESMARRES.

Malgré sa colère,

En foule il est venu la voir,

Et nous sortions bienheureux d’en avoir

Une qui pût autant lui plaire.

CRISPIN.

Où la prendre ? où l’aller chercher ?

Si ce n’est par bonne fortune

Que Madame Thalie en indique quelqu’une,

Qui de loin seulement paraisse s’en approcher.

THALIE.

Je voudrais un sujet Comique,

Bien manié, bien entendu,

Et plus galant que magnifique.

CRISPIN.

Par de certains Auteurs il sera mal rendu,

Si vous ne les aidez de votre Rhétorique.

THALIE.

Je me souviens autrefois d’avoir vu

Réussir certain Inconnu :

Il ne serait pas mal je pense,

Après l’avoir si longtemps négligé,

D’essayer sans trop de dépense,

Si le goût du Public ne serait point changé.

MADEMOISELLE DESMARRES.

Oui, l’Inconnu, la Pièce est toute préparée,

Et je crois que déjà les Rôles en sont sus.

CRISPIN.

Mais la Musique est égarée,

Les Airs et les Chansons ne se retrouvent plus.

MIMY.

Un de nos Musiciens en a fait de nouvelles,

Qui ne sont pas sans agrément ;

De ces sortes de bagatelles

Il s’acquitte assez galamment.

THALIE.

Je vous seconderai de toute ma puissance.

MADEMOISELLE DESMARRES.

Le conseil de la Muse assure le succès.

CRISPIN.

Elle ne nous a pas conseillé la dépense,

De crainte d’accident ne faisons pas grands frais.

Ne prendra-t-on que le prix ordinaire,

Ou le double, comme à Psyché ?

THALIE.

Non, le simple.

CRISPIN.

Messieurs, la Muse aime à vous plaire :

En sa faveur on vous fait bon marché.

En sa faveur aussi... Voici ce qu’il faut faire.

Agréez nos efforts, louez, applaudissez,

Venez en foule, et souvent, c’est assez.

 

 

DIVERTISSEMENT DU PREMIER ACTE

 

LA COMTESSE, OLIMPE, DEUX ENFANTS représentants L’AMOUR et LA JEUNESSE, VIRGINE, MÉLISSE, VALET MAURE

 

L’AMOUR.

Vous voyez l’Amour et la Jeunesse

Qui viennent admirer la charmante Comtesse,

Et lui dire à l’envi, qu’être de ses plaisirs,

Fait l’unique bonheur qui flatte leurs désirs.

LA COMTESSE.

Et qui les a conduits ?

VIRGINE.

Cet homme qui jargonne

Certains mots, qui ne sont entendus de personne :

Et sont tous deux entrés, demandant à vous voir.

OLIMPE.

C’est encor l’Inconnu ?

LA COMTESSE.

Nous allons le savoir.

L’AMOUR.

Nous n’avions pas besoin que l’on nous vînt conduire,

Et d’eux-mêmes jusqu’à ce jour

Jamais dans aucun lieu la Jeunesse et l’Amour

N’ont eu de peine à s’introduire.

OLIMPE.

L’aimable couple !

LA COMTESSE.

Il n’est rien de si beau.

OLIMPE.

De leur petite mascarade

Le dessein est assez nouveau.

LA COMTESSE.

Il faut les écouter ; car je me persuade

Qu’ils nous vont de l’Amour faire un joli tableau.

Dialogue de l’Amour et de la Jeunesse

LA JEUNESSE.

Quoique vous nous voyiez ensemble,
C’est assez rarement que nous sommes d’accord.

L’AMOUR.

Comme tout me cède, il me semble
Que me céder aussi ne vous ferait pas tort.

LA JEUNESSE.

Moi vous céder ! et pourquoi, je vous prie
Si vous avez des charmes assez doux
Qui plaisent en coquetterie,
Je me fais aimer plus que vous,
Jamais je ne quitte personne,
Qu’on ne s’en fasse un dur tourment.
Hélas ! dit-on, faut-il si promptement
Que la Jeunesse m’abandonne ?
Mais quand le noir chagrin de vos transports jaloux
Force deux cœurs à la rupture ;
On y trouve un repos si doux,
Qu’on vous laisse aller sans murmure,
Et je ne sache que les fous,
Qui, mal guéris de leur blessure,
Veuillent renouer avec vous.

L’AMOUR.

Et quand on ne rompt point, est-il douceurs pareilles ?

LA JEUNESSE.

C’est un miracle dont le bruit
Vient rarement à mes oreilles :
Mais regardons le dégoût qui le suit,
Ce n’est pas comme la Jeunesse
Qui se trouve aimable en tout temps,
Vous n’avez point d’agrément qui ne cesse,
Pour peu que vous alliez au-delà du Printemps.
Quand l’âge vient, la belle chose
Que les soupirs de deux amants barbons !
À quoi peuvent-ils être bons
Qu’à plaindre leur métamorphose ?
Ce n’est plus en douceurs qu’ils passent tout le jour,
L’un dort tandis que l’autre gronde ;
Et jamais on ne vit au monde
Rien de si sot qu’un vieil amour.

L’AMOUR.

De vos jeunes attraits vous faites bien la fière.

LA JEUNESSE.

On la ferait à moins. Partout je saute aux yeux,
On me nomme partout des beautés la première,
Et c’est en quoi sur vous je l’emporte encore mieux,
Car enfin pour me vaincre employez ruse, adresse.
Cherchez artifice, détours,
Il n’est point de laide Jeunesse :
Mais il est de vilains Amours.

L’AMOUR.

Vous croyez que je me chagrine
De vous voir ravaler mes droits.

LA JEUNESSE.

Il n’est pas défendu de faire bonne mine
Quoiqu’on enrage quelquefois.

L’AMOUR.

Vous n’êtes qu’un enfant, c’est ce qui vous rend vaine.
Mais je me vengerai dans peu sur votre cœur.

LA JEUNESSE.

Vos traits ne me font point de peur,
Mais finissons un discours qui vous gêne.

L’AMOUR.

Approchez, notre Conducteur,

C’est à vous d’entrer sur la Scène.

Air Italien chanté par un Indien qui a conduit l’Amour et la Jeunesse.

UN INDIEN.

Dalle sponde del mar
D’ove l’Aurora,
Nasce ad indorar
Odorosi Campi di Flora
Vengo per mirar
La beltà ch’le mondo adora.

Ad un ciglio
Fiammegiante
Ad un occhio
Fulminante
Nò, nò, nò,
Nò resister non si puto.

Venite amori,
Intuttii cuori
Spirate ardori.

OLIMPE.

En toute langue on vous dit des douceurs.

LA COMTESSE.

Ignorant qui me les adresse,

Ce sont d’assez vaines ardeurs.

Mais tâchons d’accorder l’Amour et la Jeunesse.

LA JEUNESSE.

Aucun de nous n’est d’humeur à céder.

L’AMOUR.

Il faut du moins nous accorder

Pour louer dignement cette belle Comtesse.

LA JEUNESSE.

La louer, ce n’est point mon fait,

Je ne pourrais assez élever son mérite,

Et j’aime mieux en être quitte

Pour ma Guirlande et ce Bouquet.

Prenez, d’une Déesse il n’est rien qu’on refuse.

L’AMOUR.

Pour moi qui cherche à voir tous les cœurs sous mes lois,

Je sais comme il faut que j’en use,

Et veut mettre à ses pieds mon arc et mon carquois.

OLIMPE, reprenant le carquois de l’Amour, d’où elle tire un billet parmi les Flèches.

Qu’il est bien fait ! Mais Dieux ! À l’aimable Comtesse.

Madame, c’est à vous que ce billet s’adresse.

LA COMTESSE.

Lisons.

OLIMPE.

De l’Inconnu j’admire le talent,

Tout ce qu’il fait enchante.

LA COMTESSE.

Il n’est rien plus galant.

Elle lit.

Quoique ma passion extrême
Me fasse un souverain bonheur
Du plaisir de vous dire à quel point je vous aime,
Permettez que l’Amour vous parle en ma faveur,
Avant que je parle moi-même.
J’ose attendre beaucoup d’un entretien si doux.
Hé ! qui sait mieux que ce que je sens pour vous ?

OLIMPE.

C’est s’exprimer avec tendresse.

LA COMTESSE.

On dit plus qu’on ne sent : mais je veux à mon tour.

Faire un présent à la Jeunesse.

La Comtesse lui donne un Diamant.

LA JEUNESSE.

J’accepte cette Bague, attendant l’heureux jour

Où vous saurez pour qui je m’intéresse.

LA COMTESSE.

Je ne donne rien à l’Amour.

Il se vante, et je crains ses contes ordinaires.

L’AMOUR.

Par lui-même l’Amour trouve à se contenter,

Et tant qu’il se fait écouter,

Il n’est pas mal dans ses affaires.

L’Amour et la Jeunesse s’en vont avec le Maure.

OLIMPE.

On les a bien instruits.

LA COMTESSE.

Tâche à les amuser.

Virgine, les enfants n’aiment point à se taire,

Et de notre Inconnu par eux...

VIRGINE.

Laissez-moi faire,

En badinant je les ferai jaser.

 

 

DIVERTISSEMENT DU SECOND ACTE

 

 

Scène première

 

LA COMTESSE, OLIMPE, LE CHEVALIER, LE MARQUIS, VIRGINE, MÉLISSE

 

LE CHEVALIER.

Quoique j’ignore encor quel Spectacle on apprête,

Je puis vous préparer à quelque grande Fête,

Madame ? dans ce bois j’ai vu des gens épars,

Qui pour vous la donner viennent de toutes parts,

Ils s’avancent vers vous.

LE MARQUIS.

Vous devez les attendre,

Madame, et l’Inconnu ne saurait moins prétendre :

Il connaît mieux que moi ce que c’est qu’être Amant,

Partout il vous régale.

LA COMTESSE.

Et toujours galamment ;

Du moins j’ai tout sujet d’en être satisfaite.

LE MARQUIS.

Vous pouvez l’écouter, voici son interprète.

 

 

Scène II

 

LA COMTESSE, LE MARQUIS, LE CHEVALIER, OLIMPE, LA MONTAGNE représentant COMUS, VIRGINE, MÉLISSE, SUITE de Comus

 

COMUS.

Madame, par hasard, si Comus est un Dieu

Qui soit de votre connaissance,

Vous le voyez en moi qui paraît en ce lieu,

Pour vous jurer obéissance.

Je suis un grand Maître en Festins,

À les bien ordonner on connaît mon génie :

Et l’Amour, dont le goût fut toujours des plus fins,

Voulant en bonne compagnie

Vous donner un régal approchant des divins,

M’a fait Maître d’Hôtel de la Cérémonie.

C’est un Dieu quoique très petit,

À qui l’on peut céder sans honte.

Marchez sous sa conduite, et rendez-vous plus prompte.

À faire tout ce qu’il vous dit,

Vous y trouverez votre compte.

LA COMTESSE.

Sur l’espérance des douceurs

Dont l’Amour doit combler nos cœurs,

Quand une fois il s’en empare,

Je suivrais volontiers ses pas :

Mais comme il est enfant, j’ai peur qu’il ne s’égare.

Et j’aime à ne me perdre pas.

COMUS.

Avancez, il est temps ; vite, que l’on commence.

Plusieurs Paysans apportent des corbeilles pleines de fruits.

LE CHEVALIER, à la Comtesse.

Tant de galanterie a droit de vous charmer,

Madame.

OLIMPE.

N’épargner ni peine ni dépense,

Pour fournir des plaisirs toujours en abondance,

C’est là ce qui s’appelle aimer.

COMUS.

Madame, il ne faut point différer davantage,

Quand l’Amour, dont je prends ici les intérêts,

Par ce régal vous rend un tendre hommage,

Vous connaissez à quel usage

En sont destinés les apprêts.

LA COMTESSE.

Je ne veux pas les laisser inutiles,

Olimpe y prendra part ainsi que son Amant.

OLIMPE.

Volontiers. Les refus sont assez difficiles,

Quand on agit si galamment.

LA COMTESSE.

J’ai besoin d’une main, la vôtre est-elle prête

Marquis ?

LE MARQUIS.

Vous vous moquez, je crois ?

LA COMTESSE.

Non, vous me conduirez.

LE MARQUIS.

Je renonce à la Fête,

Elle n’est pas faite pour moi.

LA COMTESSE.

Point d’excuse, point de défaites,

Je veux que vous veniez.

LE MARQUIS.

Eh ! Madame.

LA COMTESSE.

Eh, Marquis,

Sans façon, croyez-moi, faites ce que je dis.

Vous vous montrez plus jaloux que vous n’êtes.

LE MARQUIS.

Justement.

LA COMTESSE.

Je connais votre cœur mieux que vous,

Et c’est si rarement que le trouble y peut naître...

LE MARQUIS.

Oui, Madame, j’ai tort de paraître jaloux,

Car je n’ai pas sujet de l’être.

Le Marquis sort.

 

 

Scène III

 

LA COMTESSE, OLIMPE, LE CHEVALIER, COMUS, VIRGINE, MÉLISSE, SUITE de Comus

 

OLIMPE.

On dirait qu’ils sont en courroux.

LA COMTESSE.

Il aura tout le loisir de s’en rendre le maître :

Cependant divertissons-nous.

COMUS.

Tandis que vous ferez une épreuve agréable

Des douceurs que ces fruits offrent aux Curieux,

L’Amour qui m’emploie en ces lieux,

M’a fait chercher ce qu’il a cru capable

De pouvoir attacher vos yeux.

Allons, faites de votre mieux,

Et qu’à l’envie chacun de montre infatigable.

La Comtesse s’avance avec Olimpe et le Chevalier vers les corbeilles de fruits. Les Paysans et Paysannes dansent, pendant que la Comtesse et sa compagne font collation.

MADEMOISELLE DESMARRES en Jardinière.

L’âme la plus fière
Aux traits des amours,
Follement espère
Résister toujours :
On fuit, on échappe
À leurs premiers coups :
Si l’un ne nous frappe,
L’autre nous attrape :
Ces petits libertins sont tous
Tôt ou tard les maîtres de nous.
L’âme la plus fière
Aux traits des amours,
Follement espère
Résister toujours.

Aux cœurs sans défense
Leur empire est doux,
Trop de résistance
Souvent les offense.
Ces petits libertins sont tous,
Tôt ou tard les maîtres de nous.
L’âme la plus fière
Aux traits des amours,
Follement espère
Résister toujours.

MONSIEUR DE PONTEUIL, en Jardinier.

S’il faut tôt ou tard que l’on aime,
Si les traits des amours ne peuvent se parer,
N’est-ce pas une erreur extrême
De s’obstiner à différer,
S’il faut tôt ou tard que l’on aime ?

MONSIEUR SALLÉ, en Jardinier.

Tous les moments que l’on diffère
Sans éteindre nos feux contraignent nos désirs,
L’amour est un mal nécessaire,
Et l’on dérobe à ses plaisirs
Tous les moments que l’on diffère

LA COMTESSE.

Leur danse, leur voix, tout m’enchante.

LE CHEVALIER.

On aurait peine à mieux chanter.

LA COMTESSE.

La beauté de la Fête a passé mon attente.

OLIMPE.

L’Inconnu l’ordonnant, aviez-vous à douter

Qu’elle ne fût toute galante ?

COMUS.

Hé bien, pour toucher votre cœur

Comus a-t-il su satisfaire,

En Dieu d’importance et d’honneur,

À tout ce que l’Amour l’avait chargé de faire ?

LA COMTESSE.

Comus peut s’assurer partout de son bonheur,

Si Comus s’en fait un de plaire.

Mais comme en terre quelquefois

La Divinité s’humanise,

Le Dieu Comus pourrait m’apprendre à qui je dois

Le divertissement dont il me voit surprise.

COMUS.

C’est un secret qu’à conserver

Ma qualité de Dieu m’engage.

Et de ses soins l’Amour, qui veut vous éprouver,

Peut espérer quelque avantage,

Il m’attend dans le Ciel où je le vais trouver,

Employez-moi pour le message.

LA COMTESSE.

Je ne m’explique pas ainsi,

Je veux connaître avant qu’entrer en confidence.

COMUS.

Ma suite a disparue, et je suis seul ici.

Bonsoir : vivez en espérance

De sortir bientôt de souci.

LA COMTESSE.

Se taire, se cacher si longtemps quand on aime !

VIRGINE.

J’avais cru par l’un d’eux en lui parlant tout bas,

Développer ce stratagème :

Mais après quelques mots que peut-être moi-même.

En les disant n’entendait pas,

Il a d’une vitesse extrême

Pour s’éloigner doublé le pas.

LA COMTESSE.

Pour moi, je ne sais plus qu’en dire.

OLIMPE.

Le temps éclaircira l’amour de l’Inconnu,

Un peu de patience.

LA COMTESSE.

Il faut tâcher d’en rire,

En attendant que ce temps soit venu.

 

 

DIVERTISSEMENT DU TROISIÈME ACTE

 

LA COMTESSE, OLIMPE, LE MARQUIS, LE CHEVALIER, VIRGINE, LA MONTAGNE représentant un Bohémien, TROUPE DE BOHÉMIEN

 

Ils entrent tous au bruit des Castagnettes et des Tambours de Biscaye.

LA COMTESSE.

Pour des bohémiens, cet équipage est beau.

VIRGINE.

On les a rencontrés qui venaient au Château.

LA COMTESSE.

Rien n’est si propre qu’eux.

LE CHEVALIER.

La bande est fort complète.

OLIMPE.

Elle vaut bien la voir.

LA COMTESSE.

J’en suis très satisfaite.

LA MONTAGNE.

Nous ne faisons qu’arriver de Paris,

Où pour avoir des nouvelles

Assez agréables aux belles,

On nous a fait présent de ces riches habits :

Mais rien n’approche là de ce qu’on voit paraître,

Où vos divins attraits cessent d’être cachés.

Comme de tous les cœurs leur éclat se rend maître,

Souffrez qu’en l’admirant, nous vous fassions connaître

Combien nous en sommes touchés.

Toute la Troupe de Bohémiens donne des marques d’admiration, par une figure qu’elle fait en regardant la Comtesse.

LA COMTESSE.

La figure est galante.

OLIMPE.

Et fort bien ordonnée.

Partout où vous irez, le prix vous est certain.

Mais voyez cette belle main,

Et nous dites à qui l’Amour l’a destinée.

LA COMTESSE, donnant la main.

Puisque vous le voulez il faut y consentir.

LA MONTAGNE.

Comme nous sommes gens de qui la connaissance

Sut toujours de l’erreur se garantir,

C’est sur nous seuls qu’on doit prendre assurance,

Les autres ne font que mentir.

Dans vos plus grands projets vous serez traversée :

Mais en vain contre vous la brigue emploiera tout,

Vous aurez le plaisir de la voir renversée,

Et d’en venir toujours à bout.

Vous avez quelquefois de flatteuses manières,

Qui seraient pour l’espoir un motif bien pressant,

Si pour les balancer vous n’en aviez de fières,

Qui le font mourir en naissant.

Cette ligne qui croise avec celle de vie

Marque pour votre gloire un murmure fatal ;

Sur des traits ressemblants on en parlera mal,

Et vous aurez une copie

Qui vous fera croire l’original

D’un honneur ennemi de la cérémonie.

N’en prenez pas trop de chagrin ;

Si notre gaillarde figure

Contre vous quelque temps cause un fâcheux murmure,

Un tour de ville y mettra fin,

Et vous rirez de l’aventure.

Votre cœur est brigué par quantité d’amants ;

Mais le premier de tous pourrait s’en rendre maître,

Si le dernier, sans se faire connaître,

Ne vous inspirait pas de tendres sentiments :

Cependant vous aurez beau à faire,

Même prix, même gloire est acquise à leurs feux,

Vous les épouserez tous deux,

C’est du destin, un décret nécessaire.

LA COMTESSE.

Tous deux !

OLIMPE.

Si pour constant ce décret est tenu,

Madame, du Marquis nous demandons la vie,

Il vous a le premier servie :

Quand vous serez veuve de l’Inconnu,

Vous pourrez l’épouser, s’il vous en prend envie.

LE MARQUIS.

Non, non, je prends sur moi le soin de démentir

La nécessité du veuvage.

LA COMTESSE.

Laissons-là tout ce badinage,

Et songeons à nous divertir,

Point de mort, ni de mariage.

LE CHEVALIER.

Leur rapport ne peut rien que sur les scrupuleux,

Qui s’en font un fâcheux augure.

OLIMPE.

Et ces enfants qu’ils mènent avec eux

Disent-ils la bonne aventure ?

PETIT BOHÉMIEN.

Croyez-vous qu’on nous mène en vain ?

Si vous voulez, je vous dirai la vôtre.

OLIMPE.

Je vous écouterai plus volontiers qu’un autre,

Venez, j’abandonne ma main.

PETIT BOHÉMIEN.

Pour découvrir plus à mon aise.

Ce que j’y vois de plus caché,

Avant toute autre chose, il faut que je la baise,

C’est-là ce que je mets toujours à mon marché.

OLIMPE.

Il peut garder son privilège,

Sans qu’on songe à le contester.

PETIT BOHÉMIEN.

Il est doux de vous en conter,

Mais il faut se garder du piège ;

Vous êtes fine, fine, et vous ne dites pas

Tout ce que vous avez dans l’âme.

Un amant déclaré brûle pour vos appas :

Mais comme un autre en secret vous enflamme,

De ce premier, ma bonne Dame,

Vous avez peine à faire cas.

LE CHEVALIER.

Vous le voyez, Madame, un enfant vous accuse,

Condamnez mon jaloux dépit.

OLIMPE.

À faire un conte en l’air, l’âge lui sert d’excuse,

Il parle comme il peut, sans savoir ce qu’il dit.

LA COMTESSE.

Chevalier, les jaloux souvent se font haïr.

Finissons, et prions quelqu’une de la bande,

Puisque nous avons le loisir,

De danser une sarabande.

LA BOHÉMIENNE.

La belle Comtesse commande,

Nous faisons gloire d’obéir.

On danse.

MADEMOISELLE DESMARRES, en Bohémienne, chante.

Un Inconnu pour vos charmes soupire,
Son sort égalerait celui des Dieux,
S’il pouvait lire
Dans vos beaux yeux
Qu’avec plaisir vous souffrez en ces lieux
Les soins qu’il prend de vous le faire dire.

Sur son destin, que faut-il qu’il apprenne ?
D’un tendre aveu soulagera le souci
D’un cœur en peine
D’être éclairci,
Nous disons la bonne aventure ici
Ne pourrons-nous l’instruire de la sienne.

MONSIEUR DE PONTEUIL, en Bohémien.

Belles, qui voulez apprendre
Quelle fortune vous aurez,
Ne pouvez-vous pas prétendre
À celle que vous voudrez ?
Il est un sort qui de vous doit dépendre ;
D’heureux destins
Sont en vos mains,
C’est à vous de les faire, à nous de les attendre.

LA COMTESSE.

J’admire également et la voix et la danse,

Il n’est rien, dont par là, vous ne veniez à bout,

Et vous méritez tous, que pour reconnaissance...

LA BOHÉMIENNE.

Vous avoir divertie, est une récompense,

Qui nous doit tenir lieu de tout.

LA COMTESSE.

Mais je veux qu’un présent...

LA BOHÉMIENNE.

Non, Madame, de grâce,

Réservez vos présents, et nous laissez aller.

OLIMPE.

Ils sortent.

LA COMTESSE.

Suivez-les, Virgine, et que l’on fasse

Tout ce qui se pourra pour les bien régaler.

 

 

DIVERTISSEMENT DU QUATRIÈME ACTE

 

LA COMTESSE, OLIMPE, LE VICOMTE, LE MARQUIS, LE CHEVALIER, LA MONTAGNE représentant un Comédien, VIRGINE, CASCARET

 

CASCARET.

Madame...

LA COMTESSE.

Que veut-on ?

CASCARET.

Un Monsieur vous demande.

LA COMTESSE.

Voyez qui c’est, Virgine, et l’amenez ici.

VIRGINE.

Je n’irai pas bien loin, Madame, le voici.

LA MONTAGNE représentant un Comédien.

Ayant plus d’une fois eu l’honneur de paraître

Devant leurs Majestés, je croirais mal connaître

Ce que l’on doit, Madame, à votre qualité,

Si m’étant pour ce soir dans le Bourg arrêté,

Je ne vous venais pas faire la révérence.

LA COMTESSE.

Je suis fort obligée à votre complaisance.

Mais ne sachant à qui...

LE COMÉDIEN.

Je suis Comédien,

Madame.

LE VICOMTE, l’embrassant.

Ah ! serviteur. Ne vous manque-t-il rien

Pour nous pouvoir ici donner la Comédie ?

LE COMÉDIEN.

Non, Monsieur.

LE VICOMTE.

Il faudrait quelque Pièce applaudie,

Où l’emploi des Acteurs répondit...

LE COMÉDIEN.

Laissez-nous

Le soin de la choisir.

LE VICOMTE.

Et Circé, l’avez-vous ?

OLIMPE.

Nous, Circé ? non, Monsieur, Paris seul est capable...

LE VICOMTE.

Les Singes m’y charmaient, leur scène est admirable.

OLIMPE.

C’est là le bel endroit.

LE VICOMTE.

Il plaît à bien des gens.

LA COMTESSE, au Comédien.

Et comment jouerez-vous ?

LE VICOMTE.

Avec des Paravents.

LE COMÉDIEN.

Un moment suffira pour dresser un Théâtre.

OLIMPE.

La Comédie enchante, et j’en suis idolâtre.

LE VICOMTE.

J’en voudrais retrancher ces grandes passions,

On y pleure, et je hais les lamentations.

OLIMPE.

Vous êtes gai.

LE VICOMTE.

Jamais aucun chagrin en tête,

Je ris toujours.

LE COMÉDIEN.

Tandis que la Troupe s’apprête,

Nous avons parmi nous des voix dont on fait cas,

Vous plaît-il les ouïr ?

LA COMTESSE.

Qui ne le voudrait pas ?

LE VICOMTE.

Ce début de Chanteurs servira de Prologue.

LA COMTESSE, aux Acteurs Musiciens.

Avancez. Vous allez entendre un dialogue,

Dont j’ai vu jusqu’ici tout le monde charmé.

LE VICOMTE.

Voyons ce Dialogue.

LE COMÉDIEN.

Il est fort estimé.

Dialogue chanté par Monsieur et Mademoiselle Sallé, vêtus en Berger et en Bergère, sous le nom d’Alcidon et d’Aminte.

AMINTE.

Berger, vous savez le mystère
Que je brûle de découvrir
Un inconnu cherche à me plaire ?
Des feux cachés ne peuvent m’attendrir ;
Ou qu’il cesse de se taire,
Ou qu’il songe à se guérir.

ALCIDON.

Vous aimez à voir souffrir,
Il n’est point de Bergère
Plus cruelle et plus fière.
Qu’à vos yeux l’Inconnu s’ose offrir,
Vous le trouverez téméraire,
Et vous le laisserez mourir.

AMINTE.

Ou qu’il cesse de se taire,
Ou qu’il songe à se guérir.

ALCIDON.

L’Amour est un Dieu charmant,
Qui pour plaire n’a qu’à paraître :
Mais il s’offre à vous vainement,
Dans votre cœur sa flamme ne peut naître,
Si sous un long déguisement
Un Inconnu cherche à s’en rendre maître.
Pourquoi chercher à connaître l’Amant,
Quand l’Amour est un Dieu qu’on ne veut pas connaître ?

AMINTE.

Pour un invisible
Quel cœur est sensible ?
Il soupire inutilement.
Pour un invisible
Quel cœur est sensible ?
Prend-on de l’amour sans connaître l’Amant ?

ALCIDON.

D’un doux sourire,
D’un tendre espoir
Flattez son martyre,
Vous allez voir
Qu’il brûle de dire
Ce secret qu’il fait tant valoir.

AMINTE.

Ah ! S’il brûle de m’en instruire,
Adieu, Berger, adieu, je n’en veux rien savoir.

OLIMPE.

Madame, après cela que l’Inconnu hasarde

De se faire connaître.

LE VICOMTE.

Oh ! vraiment il n’a garde,

Mais aux airs sérieux, je prends peu de plaisir.

LE COMÉDIEN.

Ils en savent de gais, vous n’avez qu’à choisir.

Air chanté par MADEMOISELLE SALLÉ.

Profitons des plaisirs
Que l’Amour nous présente.
De ses tendres désirs
Il n’est point d’âme exempte.
La moins diligente
Perd le meilleur temps ;
Et telle est prude à quinze ans,
Qui devient coquette à trente.

Air chanté par MONSIEUR SALLÉ.

On ne saurait être heureux,
Si l’on n’a pas l’art de plaire,
Si l’on n’est pas amoureux,
On ne saurait être heureux,
Sans amour on ne plaît guère.
On ne saurait être heureux,
Si l’on n’a pas l’art de plaire.
L’on ne saurait être heureux,
Si l’on n’est pas amoureux.

LE VICOMTE.

Morbleu que je le suis !

OLIMPE.

La chanson est jolie :

Mais en chantant toujours le Théâtre s’oublie.

LE COMÉDIEN.

J’en aurai soin.

LE VICOMTE.

Allons-y faire travailler,

Et leur choisir un lieu commode à s’habiller.

 

 

DIVERTISSEMENT DU CINQUIÈME ACTE

 

LA COMTESSE, LE MARQUIS, LE CHEVALIER, LE VICOMTE, VIRGINE, LA MONTAGNE

 

LE VICOMTE.

Madame...

LA COMTESSE.

Quoi, déjà de retour ?

LE VICOMTE.

Ah ! ma foi

Nous allons bien ici nous divertir.

LA COMTESSE.

De quoi !

LE VICOMTE.

Eh ! Cela vaudrait mieux que votre Comédie,

Pour moi je n’ai rien vu de plus gai de ma vie,

Et vous en ferez cas sans doute à votre tour.

J’ai pris, en vous quittant, mon chemin par le Bourg,

À dessein d’obliger notre troupe obstinée

À nous tenir ce soir la parole donnée,

Mais à peine ai-je fait vingt pas, que j’ai trouvé

De quoi recevoir tous un plaisir achevé.

Une Noce morbleu : mais Noce de Village,

Plaisante au dernier point par chaque Personnage ;

Et j’ai si bien prêché, qu’elle vient sur mes pas,

Que vous rirez voyant ce grotesque fracas !

LA MONTAGNE, s’en allant.

Il est de notre cru, nous y ferons figure.

LE VICOMTE.

Ah ! morbleu que ne puis-je en faire la peinture !

Vous en ririez d’avance, et diriez comme moi,

Que tout cet attirail est un plaisir de Roi.

Entre autres l’on y voit, outre la mariée,

Qui suit en bel Arroi la Troupe conviée,

Un ramas d’animaux, qui des plus sottes gens

En différente espèce offre le passe-temps.

Un Suisse, un vieux Bourgeois, des Clercs, des Villageoises,

Des Grisettes, un Page, et de riches Bourgeoises,

Et deux Badauds, dont l’un est aussi sot, et plus

Que ne fut en son temps Thomas Diafoirus.

Ah ! qu’en guerre un parti ferait là de ravages :

Ma foi les beaux habits resteraient pour les gages.

LA COMTESSE.

L’Assemblée est risible, et c’est un raccourci.

LE VICOMTE.

Vous en aurez la vue en demeurant ici.

Si par quelque accident la Noce n’est troublée,

J’ai fait de cet endroit le lieu de l’Assemblée.

OLIMPE.

Ah ! Madame, voyons.

LA COMTESSE.

Eh ! bien voyons.

LE MARQUIS.

Comment ?

Parlez-vous tout de bon, Madame ?

LA COMTESSE.

Assurément.

LE MARQUIS.

La cohue, une Noce aurait de quoi vous plaire ?

LA COMTESSE.

Oui.

LE MARQUIS.

Vous n’y songez pas.

LA COMTESSE.

Non ? À votre ordinaire

Vous êtes complaisant.

LE MARQUIS.

Je ne m’oppose à rien :

Mais tant de sottes gens vous ennuieront.

LA COMTESSE.

Hé bien ?

Je veux me divertir à m’ennuyer...

OLIMPE.

Courage,

Tenez ferme.

LE VICOMTE.

Faut-il consulter davantage ?

Vous diriez qu’il s’agit de donner un assaut.

LA COMTESSE.

C’est que le Marquis sait...

LE MARQUIS.

Je sais ce qu’il vous faut.

LA COMTESSE.

Mais enfin je le veux.

LE MARQUIS.

Je n’ai plus rien à dire.

LE VICOMTE.

Voici toute la bande, apprêtez-vous à rire.

La noce entre. La Comtesse, le Marquis, et s’assoient sur un banc à côté du Théâtre, et pendant que les Violons jouent la Marche, tous les gens de la noce deux à deux font la révérence à la Comtesse en passant devant elle, et se vont ranger au fond du Théâtre.

VIRGINIE, après qu’ils sont rangés au fond du théâtre, dit.

Ah ! que la mariée est drôle !

LE VICOMTE.

Dame, c’est

La perle du pays.

OLIMPE.

Et ce pauvre benêt

Que je vois auprès d’elle, est-ce l’Époux ?

LE VICOMTE.

Lui-même.

Sa figure allongée est d’un vrai Nicodème.

OLIMPE, riant.

Ah !

LE VICOMTE.

Savez-vous à quoi je le trouverais bon ?

À faire de sa tête un boulet de canon.

Qu’il ferait beau la voir rebondir en l’air !

LE MARQUIS.

Je gage

Que vous vous ennuyez.

LA COMTESSE.

Vous ne seriez pas sage,

De hasarder beaucoup, vous perdriez.

LE MARQUIS.

Vos yeux

Font voir...

LA COMTESSE.

Qu’on aurait peine à se divertir mieux.

Voyons, à cela près, ce qui suit.

LA MONTAGNE, représentant Gros-Jean.

Ça morguenne,

Dansons de la gaillarde, et que l’on se démène.

PERRETTE.

C’est parler de raison... Je vas pour commencer

Prendre un de ces Monsieux, et le faire danser.

Vous plaît-il.

En faisant la révérence au Marquis.

LE MARQUIS.

Non, jamais je ne danse.

GROS-JEAN.

Parrette ;

Laisse-le là ; morgué ce n’est pas comme on traite...

PERRETTE.

Parce qu’il est tout d’or, il fait bien le Seigneur :

Oh ! si je sommes pauvres, au moins j’ons de l’Honneur,

Et je ne craignons rien.

LE VICOMTE.

Je vais prendre sa place,

C’est qu’il a du chagrin. Attendant qu’il se passe,

Voyons ce qu’à la danse un Gentilhomme vaut.

Après avoir dansé.

Hé bien, n’est-ce pas trémousser comme il faut ?

J’en fais partout de même. À vous la Mariée.

Il redanse la même Bourrée.

Elle est jolie. Un air, la taille déliée.

Allons, courage, ferme, à la recharge, bon.

Voilà s’en acquitter de la belle façon,

Je l’aime ; elle a les yeux tournés d’une manière.

LA MARIÉE.

Eh ! Monsieur.

LE VICOMTE.

Voulez-vous être ma Vivandière,

Si je vais à l’armée ? Ah ! morbleu, je prétends

Vous faire vivre en Reine, et bien passer le temps.

Qu’en dites-vous ?

LA MARIÉE.

Oh rien ; quand j’en serais bien aise,

Colin ne voudrait pas.

LE VICOMTE.

Ah ! qu’il ne lui déplaise,

Serviteur à Colin. Et ne danse-t-il pas,

Monsieur Colin ? Allons debout, et haut les bras.

À moins qu’un Marié ne soit d’humeur gaillarde,

J’en dis fi.

GROS-JEAN.

Vas danser, Colin.

COLIN.

Oh ! je n’ai garde.

LE VICOMTE.

Pourquoi ?

COLIN.

Je sis honteux devant les grandes gens,

Ils se gobargeriont.

GROS-JEAN.

Tatigué, tu te rends

Honteux ? les grandes gens sont tout comme je sommes,

Bâtis de chair et d’os, et tu fais si bien comme...

COLIN.

S’il en faut débâcler. Hé, va-t’en danser toi,

Madame voudra bien.

DORIMÈNE.

Ah ! s’il ne tient qu’à moi,

Volontiers.

GROS-JEAN.

Hé bian donc pis que n’an m’y condamne,

Dansons. Brimbalez-nous queuque bonne Pavane.

Il danse.

LE VICOMTE.

Fort bien. Le volte face, et les jambes en l’air.

Ferme en avant, jamais il ne faut reculer.

Quel compère ! ah parbleu l’on ne peut mieux l’entendre.

Voyons ce grand nigaud.

VIGNOLET, en Thomas Diafoirus.

Vous venez donc me prendre ?

Ça m’est beaucoup d’honneur : mais je suis en souci

Comme sans cheminée on peut danser ici ?

Mais n’importe. Attendez. Au lieu d’une Courante

Où je suis neuf encor, voulez-vous que je chante ?

Je sais bien mieux chanter que je ne danse.

DORIMÈNE.

Ah bon,

Sans voir la cheminée on peut prendre son ton.

VIGNOLET, chante.

Si Claudine,
Ma voisine,
S’imagine
Sur ma mine
Que je ne suis bon à rien,
Qu’en cachette
La follette
Me permette
La fleurette,
Elle s’en trouvera bien.

LE VICOMTE.

La galante chanson !

VIGNOLET.

C’est sur moi qu’on l’a faite.

COLIN.

Hé, Thomas, grand François, Dubois, Lubin, Paquette,

Est-ce que je dormons ? Pis qu’on m’a mis en train,

Margué je vais danser d’ici jusqu’à demain.

Excusez si j’osons...

Il fait la révérence à la Comtesse.

LA COMTESSE.

Vous voulez que je danse ?

LE MARQUIS.

Allez, Madame, allez faire la révérence,

Danser une Pavane avec Monsieur Colin.

LA COMTESSE.

Quand je la danserais, le grand malheur !

LE MARQUIS.

Enfin

Vous faites vos plaisirs d’une noce.

COLIN.

Oh jarnie,

Pis qu’an est si longtemps sur la çarimonie,

Je vais danser tout seul. Du plus gaillard, allons.

Il danse.

LE VICOMTE.

Peste, par haut voilà s’escrimer des talons !

COLIN.

À votre avis ?

LE VICOMTE.

Il est très souple, sur mon âme.

Vous avez bien choisi la Mariée.

OLIMPE.

Oh dame,

Quoique nés dans les champs, j’ons appris les cinq pas,

Et j’ons des qualités que bian d’autres n’ont pas.

LE VICOMTE.

Qu’en dites-vous ?

OLIMPE.

Pour moi j’en suis très satisfaite.

LE VICOMTE.

Mais à quoi rêvez-vous, aimable friponnette ?

LUBINE.

Tout doux, Monsieur, tout doux.

LE VICOMTE.

Quittez le sérieux,

Ma belle, et comme moi prenez un air joyeux.

Je veux vous mettre en train.

LUBINE.

Hé dame est-ce pour rire,

Monsieur ?

LE VICOMTE.

Non, vous avez et beau faire et beau dire,

Je vous déroberai, deux baisers seulement.

LUBINE.

Nannin, Monsieur, nannin. Queu patineux ! Vraiment

Vous êtes tout drôle. Ah !

LE VICOMTE.

Tout cela bagatelle,

Je les aurai, parbleu. La petite cruelle !

LUBINE chante.

Ne fripez pas mon bavolet,
C’est aujordy Dimanche,
Je vous le dis tout net,
J’ai des épingues su ma manche,
Ma main pèse autant qu’alle est blanche,
Et vous gagneriez un soufflet.
Ne fripez pas mon bavolet,
C’est aujordy Dimanche.

Attendez à demain que je vase à la Ville,
J’aurai mes vieux habits ;
Et les Lundis
Je ne sis pas si difficile :
Mais à présent
Tout franc
Si vous faites l’impertinent,
Si vous gâtez mon linge blanc,
Je vous battrai comme il faut de la hâte,
Je vous battrai,
Pincerai,
Piquerai,
Je vous mordrai,
Grugerai,
Pillerai,
Menu, menu, menu comme la chair en pâte ;
Hon, voyez-vous, j’avons un terrible tâte,
Que je cachons sous notre bonnet.
Ne fripez pas mon bavolet,
C’est aujordy Dimanche.

OLIMPE.

Et ce bon Gentilhomme ?

LE VICOMTE.

Il a vécu, Madame.

MONSIEUR DE SOTTENVILLE.

J’ai bien valu mon prix autrefois, sur mon âme.

Il chante.

J’étais jeune Coq autrefois,
Et mon chant réveillait les plus sages Poulettes ;
J’ai vieilli depuis, et ma voix
Endort même les plus coquettes.

Toutes les personnes de la Noce dansent un Branle, et MONSIEUR SALLÉ chante.

À la santé de Colin,
L’heureux mari de Colette ?
Outre qu’il est mon voisin,
C’est qu’il aime le vin,
C’est qu’il aime le vin.
Sa femme aime peu la diète.
Fessons notre vin,
Buvons à Colette,
Fessons notre vin,
Buvons à Colin.

Vive Colette et Colin,
Et les enfants qu’ils vont faire.
Comme je suis bon voisin
J’en serai le Parrain,
J’en serai le Parrain.
Colin prendra bien l’affaire.
S’il n’est pas certain
D’en être le père,
Il sera certain
D’avoir bon voisin.

Les violons continuent de jouer le même Branle, et les gens de la Noce se retirent en dansant.

LA COMTESSE.

En vérité, Marquis, ils m’ont bien divertie.

LE VICOMTE, arrêtant Gros-Jean.

Un mot, mon cher, ô çà, parlons sans raillerie.

GROS-JEAN, voulant s’échapper.

Morgué, laissez-moi là.

LE VICOMTE, lui ôtant sa fausse barbe.

Non, non, restez ici.

Voilà le pèlerin qui nous met en souci.

LA COMTESSE.

L’Inconnu ?

LE VICOMTE.

Le Grosset.

LE CHEVALIER.

Quand il a fait son rôle,

Le Vicomte d’abord a remis sa parole.

OLIMPE.

Ce n’est point l’Inconnu.

LE VICOMTE.

Ce l’est assurément,

Madame. Parlez donc, Sieur Grosset, autrement

Vous saurez ce que c’est qu’un Vicomte en colère.

LA MONTAGNE.

Mais quoi...

LE CHEVALIER.

Sur ce sujet, il faut nous satisfaire,

Et de force ou de gré nous prétendons savoir...

LA MONTAGNE.

Regardez ce portrait, vous saurez mon pouvoir,

Et quel est l’Inconnu.

OLIMPE, à la Comtesse.

Si rien ne le déguise

Vous y verrez des traits... Vous en êtes surprise.

Hé bien, a-t-il l’air bon, qu’en dites-vous ?

LA COMTESSE.

Je dis...

Voyez.

LE CHEVALIER, regardant le portrait.

C’est le Marquis.

OLIMPE.

Le Marquis.

LE VICOMTE.

Le Marquis !

OLIMPE.

Juste Ciel !

LA COMTESSE, au Marquis.

Quoi, c’est vous dont l’adresse cachée

Cherchait à m’engager ?

LE MARQUIS.

En êtes-vous fâchée ?

Les soins de l’Inconnu pourront-ils vous toucher ?

LA COMTESSE.

Qui l’aurait cru, qu’en vous il l’eût fallu chercher ?

LE MARQUIS.

Non, ne m’en croyez pas : mais, aimable Comtesse,

Croyez-en ce présent que m’a fait la Jeunesse.

LA COMTESSE.

C’est là mon diamant. Vous étiez destiné

À recevoir enfin la main qui l’a donné ;

Il est juste, et j’en fais le prix de votre flamme.

LE MARQUIS.

Ô bonheur, qui remplit tous mes vœux ! Mais, Madame,

Vous souvenez-vous...

OLIMPE.

Oui, je ne puis oublier

Que je vous ai promis d’aimer le Chevalier ;

Vous avez de l’honneur, c’est assez vous en dire.

LE CHEVALIER.

Doux et charmant aveu, qui finit mon martyre ?

Madame, je puis donc prétendre à votre foi ?

OLIMPE.

Si ma mère y consent, je vous réponds de moi.

LE VICOMTE.

Je vous vois-là tous quatre en bonne intelligence,

Et moi, que devenir ?

LA COMTESSE.

Vous prendrez patience.

LE VICOMTE.

Oui ? de mes pas pour vous c’est donc là le succès ?

Se charge qui voudra du soin de vos procès.

Adieu.

LA COMTESSE.

Le prendrez-vous, Marquis ? il vous regarde.

LE MARQUIS.

Que ne ferais-je point ?

LE CHEVALIER.

La retraite est gaillarde.

OLIMPE.

C’est un extravagant dont nous sommes défaits.

LA COMTESSE.

Allons.

LE MARQUIS.

Puisse l’Amour ne nous quitter jamais.

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